b sonneck a écrit :
Il me faut donc formuler autrement mon interrogation : pourquoi l'Allemagne a-t-elle pris la décision d'accélérer le processus en déclarant par anticipation la guerre à la Russie, puis à la France ?
Il faut mettre cela en perspective avec les mobilisations de guerres. Comme dit précédemment, tous les militaires de l'époque ont en tête les tables de mobilisations avec le nombre d'homme arrivant par jour sur le front pour son armée et pour les armées ennemies. Ils sont contient de l'impact d'un retard dans la mobilisation. Le pays mobilisant en premier a mathématiquement un avantage certain. Dans ce contexte, une mobilisation peut quasiment être vue comme une déclaration de guerre. Si la Russie mobilise, cela implique que l'Allemagne doit mobiliser afin de pouvoir faire face au rouleaux compresseur russe (l'avantage de l’Allemagne étant sa rapidité à mobiliser comparé aux russes, tout retard est ainsi dangereux). Si la France mobilise aussi, cela implique qu'une guerre sur deux front devient possible. Or le plan pour prévenir cette guerre sur deux front qui est vue, avec raison, comme fatale à l'Allemagne c'est le plan Schlieffen, plan qui implique de bouter la France hors du conflit aussi vite que possible avant que la Russie n'aie mobilisé et ne puisse faire jouer tout son potentiel. Or si la Russie a déjà commencé à mobiliser, alors le plan Schlieffen pourrait devenir caduc, ce qui serait une catastrophe pour l'Allemagne.
Si on reprend les dates en gardant l'impact des mobilisations en tête, la suite des événements devient plus logique:
- 25 juillet : Mobilisation serbe
- 25 Juillet : l’Autriche-Hongrie annone une mobilisation partielle pour le 28
- 28 Juillet : l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Serbie
- 29 Juillet : la Russie annonce une mobilisation partielle pour le 30
- 30 Juillet : la Russie annonce mobilisation totale
- 31 Juillet : l’Allemagne demande à la Russie de surseoir sa mobilisation car elle voit cela comme une volonté de commencer la guerre. La Russie refuse
- 31 Juillet : Mobilisation totale autrichienne
- 31 Juillet : l’Allemagne rentre en état de danger de guerre (réquisitions, fermeture des frontières, …)
- 31 Juillet : l’Italie vote et annonce sa neutralité
- 1 août (15h) : la France annonce mobilisation totale
- 1 août (15h) : l’Allemagne annonce mobilisation totale
- 1er août : l'Allemagne déclare la guerre à la Russie.
- 2 août : l’Allemagne occupe le Luxembourg
- 3 août : l'Allemagne déclare la guerre à la France
- 4 août : le Royaume-Uni déclare la guerre à l'Allemagne.
- 5 août : l'Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Russie.
La réaction de l’Allemagne s'explique par la peur de perde son principale avantage: sa vitesse de mobilisation, seul garante d'une victoire contre une Russie bien plus peuplée. L'aveuglement de la Russie s'explique par son incompréhension de la guerre moderne, elle ne voit pas qu'une mobilisation totale est considérée comme un risque vitale par l'Allemagne. Ensuite tout s’enchaîne.
Rebecca West a écrit :
Si les clauses -en cas de victoire de l'Allemagne- étaient déjà préparées, c'est qu'en amont les militaires et les politiques ont déjà fourni un travail (Plan Schlieffen et plan XVII).
Maintenant j'ignore combien de temps demande ce genre de travail mais il existe tout de même une focalisation sur "un conflit", focalisation qui met les politiques et les militaires en état d'alerte voire anticiper un état d'alerte qui se dessine de plus en plus nettement.
Je dois avouer mon manque totale et absolu de connaissance sur la préparation des clauses en cas de victoire. Au niveau des plans des militaires, c'est leur travail de créer des plans. Un plan militaire cela prend des mois à être préparé, donc dans le doute les états major modernes en préparent pour toutes les situations. Je ne serais pas surpris si l'état major Français avait en ce moment même un plan d'intervention en Belgique dans ses cartons. Il est possible que ce soit le même pour les clauses de victoires. La France sait déjà à quoi ressemblerait le traité de paix imposé à l’Allemagne et inversement. Cela ne présuppose donc rien.
Rebecca West a écrit :
Maintenant des pays ne "perdent" pas des territoires : ceci fait presque plus d'un siècle que l'on écrase l'un ou l'autre et entre temps, la reconstruction semble toujours sommaire/bancale/éphémère/pas aboutie.
Un morceau de territoire est enlevé manu militari par un voisin, on peut s'en remettre, on s'en remet d'autant plus que le fait de songer qu'à terme on va "récupérer" ce qui a été pris impulse une dynamique au sein du pays floué (nationalisme, économie etc.). En face, on doit sentir ceci et le devoir est de préparer une réplique (les politiques comme les militaires).
Je suis d'accord que beaucoup de mentalité de l'époque étaient belliqueuses. L'horreur d'une guerre totale n'étant pas encore comprise. Après, je reste sur mon point de vue, Des mentalités différentes auraient put aboutir à des résultats différents. Pour prendre un autre conflit de l'époque, lors de son indépendance, la Belgique a dut donner une partie de ses territoires aux pays-bas. La Belgique l'a accepté et est passé à autre chose. idem pour la guerre entre Mexique et Etats-unis, le Mexique a perdu des territoires gigantesque, l'a assez mal pris, mais il n'y a plus de conflit sur le sujet entre les deux pays. Peut-être que 30 ou 40 ans en plus sans tensions ou d'autres politiques auraient apaisé la situation en Europe. On ne saura malheureusement jamais.