La fameuse Légion Tchèque durant la guerre civile russe, enflamma les imaginations, en Europe, durant le conflit.
1°) Les origines de la Légion.
A l'origine, la Légion Tchèque est une curieuse unité militaire, constituée, à l'époque de Kerenski, avec des prisonniers tchèques de l'armée austro-hongroise et des déserteurs de cette même armée. Après la paix de Brest-Litovsk, les bolcheviks, avec l'accord des alliés, s'engagent à transporter les 42 000 hommes de cette Légion par le transsibérien jusqu'à Vladivostok, pour les évacuer en Europe Occidentale. Mais la situation en Sibérie Orientale reste très confuse. Entre les raids de l'ataman Semenov, seigneur de la guerre, agissant pour le compte des japonais, qui aimerait annexer la région de Transbaïkalie, et le débarquement d'un petit corps expéditionnaire anglais de 300 soldats, à Vladivostok, début avril 1918, pour garder un stock d'armes anglaises destiné à la Russie et jamais payé, le pouvoir bolchevik craint une action japonaise dans la région et fait donc traîner l'acheminement des tchèques, qui sont éparpillés le long du transsibérien. Mais les tchèques en ont un peu marre de mariner dans les vases steppes, et un incident avec des prisonniers hongrois, en mai 1918, à Tcheliabinsk, va mettre le feu aux poudres.
2°) La Légion Tchèque contre les bolcheviks.
Devant le grabuge des tchèques à Tcheliabinsk, Trotsky, le 25 mai, émet un décret pour désarmer la légion ... action non-obligatoire qui va lui aliéner la Légion. Car cette dernière ne rêvait que d'une chose, embarquer à Vladivostok pour rejoindre la future terre promise, la Tchécoslovaquie. Sous l'impulsion du capitaine Gadja, chef du 7eme régiment de la LT, le 27 mai 1918, les tchèques investissent la garnison rouge de Tcheliasbinsk, puis vont s'emparer des villes le long du Transsibérien, jusqu'à Kazan, à 1 000 kilomètres vers l'Ouest, où la Banque de Russie a entreposé son magot, constitué de 80 millions de livre sterling.
Les tchèques sont alors divisés en 3 forces:
- Un groupe qui est arrivé à Vladivostok, en juin 1918, commandée par un officier russe d'ascendance tchèque, le général Dietrichs, qui renonce à s'embarquer vers l'Europe pour venir à la rescousse des autres forces de la Légion.
- Un autre groupe échelonné le long du transsibérien, du lac Baïkal à Omsk. Son objectif est de s'emparer d'Irkoutsk, bastion bolchevik. Il contrôle 40 tunnels dans la région du Baïkal. Il est commandé par le capitaine, puis général Gadja.
- enfin, le troisième groupe, commandé par le général Tchetchek, se trouve très à l'Ouest, dans le bassin de la Volga. C'est ce groupe qui après avoir investi Samara a permis la création d'un gouvernement Socialiste-Révolutionnaire.
De Tcheliabinsk à Vladivostok, il y a 7 260 kilomètres, et les tchèques sont éparpillés tout le long du transsibérien. Rapidement, dès le 26 juin 1918, les alliés prennent conscience qu'au lieu d'un réembarquement fort incertain à Vladivostok, la Légion Tchèque serait plus utile, en Russie, contre les bolcheviks, qui ont trahi la cause alliée. Le 7 juillet 1918, les chefs de la LT décident donc de rester en Russie et de combattre les bolcheviks, avec les forces blanches, comptant sur une intervention militaire alliée. D'ailleurs, peu après, un embryon d'armée blanche, s'appuyant sur des troupes de la LT s'emparera de Ekaterinbourg, ce qui justifiera, le massacre de la famille impériale, le 16 juillet.
3°) La lente dissolution de la Légion.
Le Conseil National Tchèque va mobiliser les énergies pour sauver cette Légion, en la réembarquant ou en l'armant. Le 6 juillet 1918, le Président Wilson décide d'envoyer un corps expéditionnaire américain à Vladivostok pour sauver la Légion. 7000 soldats américains commandés par le Général Graves, venant d'Honolulu, débarqueront dans le port sibérien, mais ils n'en bougeront jamais ! La France enverra le général Janin, avec le titre de commandant de la Légion Tchèque, mais celui-ci s'entendra toujours très mal avec l'amiral Koltchak, chef des forces blanches de Sibérie, mais considéré comme l'homme des anglais, par le français. En septembre 1918, l'armée rouge avait déjà repris Kazan, et le 8 octobre, les blancs durent évacuer Samara. Le 20 octobre, les régiments de la 1re division tchèque se mutinent et la 2eme division va suivre. La situation est calamiteuse pour ces tchèques, dans ces immensités russes, car ils ne sont pas ravitaillés.
Désormais, les tchèques, en pleine débandade, seront juste utilisés pour contrôler le transsibérien.
Le 15 octobre 1918, l'amiral Koltchak arrive à Omsk, le 18 novembre, il devient le chef des armées blanches en Sibérie. L'amiral compte sur les tchèques, mais ceux-ci sont complètement démoralisés, surtout que le 28 octobre 1918, la Tchécoslovaquie est née et qu'ils ne rêvent que de retourner dans leur nouveau pays. Après la déroute des forces blanches de Sibérie devant l'armée rouge commandée par Frounzé, à partir d'avril 1919, Koltchak évacuera sa capitale, Omsk, pour Irkoutsk et "protégé" par des tchèques. Mais la région de Transbaïkalie est désormais contrôlé par les rouges et les tchèques, le 13 janvier 1920, accepteront de livrer l'amiral aux bolcheviks.
_________________ Dieu ne joue pas aux dés !
|