Citer :
On ne peut pas obliger tous les "spécialistes" à inventer un nouveau mot.
C'est ce qu'ils sont pourtant en train de faire, sans y être nullement "obligés", tout en évitant d'"inventer" quoi que ce soit.
Lisez mieux ce que les différents intervenants au sein de cette discussion postent comme citations de travaux.
Citer :
Le terme "massacre" n'est pas approprié dans le cas de l'Holodomor.
C'est pour cela qu'a été aussi évoqué le terme de
"crime de masse", qui parait plus adapté à l'ensemble des chercheurs et spécialistes (pas des journalistes qui n'y entendent souvent rien) de la question de la famine en Ukraine.
Un Sémelin, un Bruneteau, mais surtout le soviétologue réputé Nicolas Werth vont dans cette direction.
A ce titre, l'article qui suit est une excellente synthèse (la meilleure citée jusqu'à présent je pense) de sa part concernant ce "crime de masse". Il refuse de trancher définitivement sur la question du génocide ou du crime contre l'humanité. Je pense que c'est la plus intéressante conclusion qui soit, car même si l'article porte particulièrement sur la famine en Ukraine, il est très délicat de la délier des autres, qui s'observent pratiquement aux mêmes dates et pour les mêmes raisons : collectivisation forcée et violente, volonté de briser les résistances paysannes dans certaines Républiques d'URSS par la faim (puisque les autres moyens ont échoué), incurie générale et aveuglement du système économique stalinien :
Nicolas Werth a écrit :
Dans ces conditions, malgré les indéniables progrès réalisés dans notre connaissance des famines du début des années 1930 en URSS, le débat et l’étude comparative des famines soviétiques du début des années 1930 ne peuvent, hélas, aujourd’hui, guère progresser. Il s’agit pourtant de l’une des plus grandes tragédies, et l’un des plus grands crimes de masse, qu’on le qualifie de génocide, de crime contre l’humanité ou de quelque autre qualificatif de l’histoire européenne du 20e siècle.
https://www.cairn.info/revue-vingtieme- ... age-77.htm La très sérieuse
Revue du Vingtième Siècle opte, quant elle, d'employer le terme de "crime de masse".
Citer :
Dans un rapport de 63 pages, un groupe d’avocats et d’experts des droits humains a conclu qu’il n’y avait aucune preuve de massacre de la minorité musulmane ouïgoure, mais que « les éléments d’un génocide intentionnel » tels que définis par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de l’Organisation des Nations unies (ONU) étaient pourtant « établis ».
Laissons expliquer l'Histoire aux historiens et dire le Droit aux gens de Loi. A chacun sa spécialité.
Ceci dit, un très grand nombre d'historiens refuse désormais d'employer un terme aussi galvaudé que "génocide" et privilégie l'utilisation de "massacres" et/ou de "crimes de masse".
Werth fait d'ailleurs autant preuve d'une grande pédagogie dans cet article de synthèse que d'impartialité à restituer les faits :
Nicolas Werth a écrit :
Comme l’a justement écrit le pionnier des études sur ce drame, l’historien James Mace, la famine ukrainienne fut une « man-made famine? », la conséquence directe d’une politique d’extrême violence (la collectivisation forcée des campagnes) mise en œuvre à partir du début de l’année 1930 par le régime stalinien. Ce dernier entendait prélever sur la paysannerie un lourd tribut afin de réaliser « l’accumulation socialiste primitive » indispensable à l’industrialisation accélérée du pays, et imposer un contrôle politique sur les campagnes, restées jusqu’alors largement en dehors du « système de valeurs » du régime. Conséquence directe, mais évidemment inattendue et encore moins « programmée » d’une politique, la famine fut, en Ukraine et au Kouban, aggravée à partir de l’automne 1932 par la volonté inébranlable de Staline de briser, par l’arme de la faim, les résistances paysannes à la collectivisation et aux prélèvements démesurés sur les récoltes, particulièrement fortes dans ces régions.