Puyol a écrit :
La fiche de José Aboulker confirme que les les chefs de la Résistance d'Alger agissent au nom de Giraud :
Dans la nuit précédant le débarquement allié en Afrique du Nord, qui eut lieu le 8 novembre 1942, José Aboulker, installé au commissariat central, déclencha, l'occupation d'Alger par 400 résistants.
Ces volontaires civils, dirigés par leurs chefs de groupe, eux-mêmes officiers de réserve, neutralisèrent les centres de commandement et de transmissions, occupèrent les points stratégiques et arrêtèrent les responsables militaires et civils vichystes, à commencer par le général Juin, commandant en chef, et l’amiral François Darlan et lancèrent à Radio Alger, un appel au nom du général Giraud, incitant les Français à reprendre la guerre aux côtés des Alliés.
(...)
Là c'est la grosse rigolade : Giraud est inconnu en AFN, autrement que par les journaux pour sa spectaculaire évasion de Königstein. Sollicité par "les Alliés" (sponsorisé par Roosevelt pour éviter De Gaulle, en fait) il a un peu surpris en faisant savoir à Eisenhower qu'il prenait le commandement. Il a fallu le raisonner, mais il a boudé quelques jours. Posé sur un aérodrome annexe d'Alger - l'aérodrome de Maison-Blanche n'est pas sûr, il reste des combats sporadiques autour d'Alger - il s'y trouve très seul, marquant sa surprise de ne pas voir l'armée d'Afrique se mettre immédiatement à ses ordres. Celle-ci persiste à obéir à Darlan et Juin. L'appel lancé sur Radio Alger a été enregistré en France, et Murphy, qui mène la danse à Alger le fait diffuser.
Cet appel ne marque aucune sujétion des résistants à Giraud. Simplement, comme rien n'a été préparé, ces résistants, qui viennent de mettre la main sur Darlan et Juin et de les assigner à domicile, et à qui on dit que Giraud commande l'armée d'Afrique, montent dans le train en marche, sous réserve d'inventaire.
Il va de soi que des résistants composés à plus de 50% de Juifs algériens ne risquaient pas de s'entendre longtemps avec ce brav'général qui ne va pas tarder à définir sa politique coloniale par le slogan :"Le Juif à l'échoppe, l'Arabe à la charrue".
D'ailleurs ces résistants, lorsqu'ils ont le tort d'être trop voyants, ou de ne pas se méfier, se retrouvent enfermés dans des camps par le pouvoir néo-vichyste que Murphy choisit d'installer en AFN sous la houlette de Darlan. Certains y seront encore lorsque De Gaulle viendra co-diriger l'AFN en mai 43, et commencera à mettre de l'ordre dans cette pétaudière.
Citer :
[Après le débarquement], les Alliés considérèrent que Darlan était le seul homme capable de rallier aux Alliés les Français d'Afrique du Nord. Si Giraud fut nommé commandant en chef des forces terrestres et aériennes, Darlan devint Haut-commissaire et de Commandant en chef des forces navales.
On se demande qui écrit ces articles : "les Alliés considérèrent que Darlan était le seul homme capable de rallier aux Alliés les Français d'Afrique du Nord" c'est grandiose, surtout quand on sait que Darlan aurait dû se trouver à Vichy ce jour-là, et qu'il est en discussion avec Murphy sous bonne garde, les résistants ayant encerclé sa villa, et fait des chichis pour faire cesser le feu. Ce qu'il accepte pour Alger, mais ne fera que le surlendemain pour Oran et le Maroc. (le général Clark fou furieux a dû venir menacer de le fusiller : ses hommes continuent à se battre pendant que le traitre tarde à retourner sa veste nazie, prétend continuer d'agir au nom du Maréchal, exige et obtient tous les pouvoirs sur les Français d'AFN dans ses négociations avec Murphy.)
Au final Darlan devient "commandant civil et militaire" (Des Français d'AFN et d'AOF) et on case Giraud comme commandant de l'armée d'Afrique. Fallait-il que Roosevelt déteste De Gaulle pour se prêter à de pareils arrangements !
Ce sont les généraux alliés qui vont faire connaître discrètement leur sentiment, aidés par une presse américaine et plus encore anglaise déchaînée. (Au cours d'une conférence de presse, Darlan prétend qu'il a été
forcé d'aller rencontrer Hitler à Berchtesgaden. Grimace de dégoût des journalistes : "Pokerface !") Roosevelt dans les cordes doit concéder que Darlan est "un expédient provisoire".
Darlan ne tardera pas à être assassiné par un groupe de résistants royalistes (exécuté, pour moi) mais Giraud, qui reprend la place, traînera des pieds encore 6 mois pour établir à Alger un pouvoir commun avec De Gaulle et la France Libre.