Je partage ici le commentaire d'un ancien journaliste du Figaro : Patrice de Plunkett.
<< 10 mai 1981 : il y a 40 ans, François Mitterrand devient le premier président de gauche de la Ve République. L’événement est symboliquement considérable et cette année-là l’hymne du PS chante, sur une mélodie de Théodorakis : « Tout devient possible ici et maintenant »… En fait « tout » n’est pas devenu possible. On l’a compris avec le recul du temps.
Par exemple, je me souviens de la nervosité qui régnait en juin 1981 dans le journal où je travaillais : il appartenait à un groupe de presse dont le patron Robert Hersant, surnommé « le papivore » par Le Canard enchaîné, était la cible favorite du PS – qui avait inscrit parmi ses priorités le démembrement du groupe.
Or ce que nous avons découyert bien après, c’est qu’en réalité Robert Hersant et François Mitterrand n’étaient pas ennemis ! Ils étaient même bons amis, depuis les péripéties de la IVe République, du temps où l’un et l’autre étaient élus du centre gauche : l’un au Sénat, l’autre au Palais-Bourbon.
Non seulement le groupe Hersant n’allait pas être démembré, mais ses journaux allaient faire d’excellentes affaires durant toute l’ère Mitterrand. Ce qui prouve que la scène politique est comme l’iceberg : le public n’en voit que la plus petite partie.
Autre exemple : c’est grâce à François Mitterrand, personnellement, que le Front national de Jean-Marie Le Pen a pu s’installer en concurrent de la droite classique : d’abord en 1981, quand l’Elysée a prié les deux grandes chaînes publiques TF1 et Antenne 2 d’inviter Le Pen sur les plateaux. Puis en 1986, quand la proportionnelle fut instaurée aux législatives... Reconnaissant, Le Pen allait déclarer en 2011 : « Mitterrand était un vrai politique ». Ça dépend du sens que l’on donne à ce mot.
Vous me direz : tout a changé depuis ces temps lointains… Oui ! et c’est pour ça que je vous en parle ce matin : seul le recul du temps permet de comprendre en profondeur. Il ne faut donc pas céder à l’impression du moment, qui ne correspond jamais à toute la réalité. C’est à méditer, aujourd’hui où l’on ne s’intéresse justement qu’au moment présent… >>
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