Les dirigeants de l'Allemagne de l'Est étaient déjà dans une situation scabreuse au moment où ont commencé les manifestations de masse : le Rideau de fer était déjà ouvert.
Cela résultait d'une décision des Hongrois, qui avaient décidé, avec un beau culot (mais peut-être après avoir sondé le Kremlin ?) d'autoriser le libre-passage entre la Hongrie et l'Autriche. Les Hongrois n'avaient guère bougé, sauf pour faire du tourisme ou des études à Vienne : la Hongrie, massacrée en 56, avait gentiment, dans son coin et avec une parfaite allégeance à Moscou, commencé depuis quelques années sa révolution économique : le petit commerce, les hôtels, les garages et d'autres professions pouvaient être privés, d'où une élévation très nette du niveau de vie : "la cellule la plus agréable du Bloc", disait-on à l'Est.
Mais ce libre-passage n'avait pas échappé aux Allemands de l'Est, qui plus que d'autres pouvaient avoir envie de changer de vie, sachant qu'il y avait un pays jumeau à l'ouest - que de plus leur accordait d'office la citoyenneté. D'où des trains chargés d'Allemands de l'Est, vers Budapest, qui faisaient ensuite la route à pied (ou en bus ?) dans le secteur de l'ancien barrage : il n'existait évidemment pas de ligne de chemin de fer à travers celui-ci.
La blague qui courait Berlin : on conseillait à Honecker de ne pas oublier d'éteindre les lumières, lorsqu'il serait le dernier à partir.
Honecker qui allait bientôt céder la place à plus jeune (Egon Krenz) semble-t-il sur instruction de Gorbatchev, à qui on prête cette phrase :"débarrassez-moi de ce fossile stalinien !" Donc les autorités est-allemandes étaient déjà déstabilisées, tant par cette hémorragie prévisible de leurs citoyens (surtout les plus diplômés : on retrouvait la situation à l'origine de la Construction du Mur de Berlin) que par le lâchage sans équivoque de la part de Moscou : les pauvres garçons se sentaient orphelins. Les temps changeaient... et ils n'étaient pas certains d'y avoir leur place !
Je ne crois pas que la direction de l'Allemagne de l'Est ait été infiltrée par les services secrets de la RFA. (Et si c'est le cas on ne saura pas avant très longtemps) En revanche, des agents du BND étaient infiltré dans les manifs monstres qui avaient lieu à l'est.
En particulier, épisode bien connu, lorsque la foule à Berlin Est a pris d'assaut l'immeuble de la Stasi, ces agents y ont pénétré les premiers, et ont dissuadé la foule de jeter les dossiers de la Stasi par les fenêtres. (Premier réflexe de gens surveillés et mis en fiches depuis des années, mais il y avait là trop de renseignements passionnants pour que le BND laisse gaspiller une si belle moisson.)