La phrase de Geopolis nous entraîne dans une digression sur la langue. A-t-il des sources pour dire que le conflit hutu-tutsi rejoint des lignes divisant francophones et anglophones? Les tutsis étaient francophones. L'anglais est devenu un enjeu plus tard, mais pas selon des lignes ethniques, et nous parlons de développements plus récents.
Barbetorte a écrit :
Mais ce n’est pas tout, il existe encore des langues véhiculaires, purement africaines, usitées dans un rayon plus large que la langue maternelle, comme le swahili.
Les langues "officielles", c'est-à-dire utilisées par l'administration et les services de l'Etat sont un peu plaquées. Ce n'est qu'en 2017 que Kagame a ajouté le swahili en 4e langue officielle (après le kinyarwanda, le français et l'anglais), ce qui était une condition pour intégrer le Rwanda à la CAE (Communauté d'Afrique de l'Est). Il faut une politique étatique volontariste et active pour ajouter une langue. C'est ce qu'a fait la France pour imposer le français en France, et cela a pris des années.
A partir des indépendances, la carte linguistique de l'Afrique sub-saharienne n'avait plus vocation à rester figée. Une lutte d'influence a commencé entre le français, l'anglais, et le portugais, pour avoir des débouchés commerciaux (dont des armes) et remporter des marchés d'exploitations de matières premières. Dans cette lutte, les moyens les plus grands sont du côté de l'anglais.
Les partenariats commerciaux sont une très forte incitation. On a parlé de la CAE . L'admission dans le Commonwealth est également une arme déterminante:
http://news.bbc.co.uk/2/hi/africa/8384930.stm. Le Mozambique lusophone a rejoint le commonwealth en 1995, le Rwanda l'a fait en 2008. De ce moment, le statut de l'anglais supplante celui du portugais et du français pour les affaires. C'est ce qui est repris dans l'article de
La Croix:
"en 2008, le Rwanda a basculé dans le Commonwealth. Le programme du ministère est devenu anglophone du jour au lendemain. Les professeurs qui enseignaient depuis parfois plusieurs décennies en français ont dû changer de langue".Il faut ajouter la forte présence de la Chine, partout, notamment pour les ressources minières. Les Chinois traitent parfois en français en pays francophone mais le forum Chine-Afrique, se tient principalement en anglais.
Les média sont également un vecteur puissant: BBC contre RFI par exemple, les deux radios étrangères sont largement écoutées en Afrique, avec des programmes centrés sur l'Afrique. La radio est le media le plus puissant car le plus simple, omniprésent.
La lutte d'influence linguistique passe aussi par le spirituel et les églises: les nouvelles églises protestantes évangélistes, financées par les Etats-Unis s'étendent dans les pays francophones et font concurrence (avec l'Islam) au catholicisme.
https://www.cairn.info/revue-herodote-2 ... ge-129.htmhttps://www.liberation.fr/planete/2016/ ... e_1435804/Enfin, il faudrait ajouter la très grande influence des ONG, qui souvent non seulement remplacent des services publics inexistants, mais sont aussi des employeurs recherchés, partout. Depuis les années 1990, les ONG de cadres anglophones, confessionnelles ou non, telles World Vision (évangéliste) ou Care (non religieuse) sont plus nombreuses et de taille plus importante que les ONG francophones.