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Désolé Karolus pour cette réponse tardive, je viens juste de rentrer des vendanges.
Voici quelques extraits de mon mémoire, introduction, conclusion et sommaire. Si vous voulez que je poste un extrait précis, faites moi signe.
La plupart des notes infrapaginales ne passent pas au copié-collé, je place donc les plus intéressantes entre crochets et écarte les références d'érudition.
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Introduction
Si, comme tant d'autres nations, la "petite nation" lorraine [Ainsi que la qualifiait Christian Pfister, faisant d'elle une composante de la "grande nation" française, tour de passe-passe commode pour soustraire le sentiment régionaliste aux accusations de séparatisme.] possède un événement fondateur, alors cet événement ne peut être que la bataille de Nancy de 1477. Cette bataille marque en effet pour la Lorraine la césure entre, en amont, un Moyen Age caractérisé par l'émiettement politique et par un retard constant en de nombreux domaines, et, en aval, des Temps Modernes où une Lorraine territorialement plus cohérente, à la suite de l'union, définitive en 1480, des duchés de Lorraine et de Bar et du comté de Vaudémont, devient une force politique avec laquelle il faut désormais compter, ne serait-ce que sur le plan diplomatique.
Mais, outre le côté pratique d'une bataille pour fixer une périodisation, c'est surtout en tant que symbole d'un certain patriotisme que la journée du 5 janvier 1477 et le conflit qu'elle ponctue sont présents dans les esprits lorrains. L'archiviste et historien lorrain Henri Lepage écrivit ainsi au milieu du XIXe siècle : « C'est un éternel titre de gloire pour notre pays d'être resté fidèle en dépit des dangers qu'il y avait à courir » . Par de nombreux ouvrages destinés au grand public, de la bande dessinée à la brochure touristique, par de nombreux ancrages dans la pierre à Nancy , projets où l'on retrouve souvent des lotharingistes comme le baron Auguste-Prosper-François Guerrier de Dumast (1796-1883) ou Jean Cayon (1810-1865), la bataille où périt Charles le Téméraire est célébrée comme l'aboutissement de la lutte du peuple lorrain pour se libérer de l'envahisseur bourguignon. Il s'agit bien entendu d'une vision idéalisée — comment pourrait-il en aller autrement ? —, mais notre propos n'est pas de reprocher au baron Guerrier de Dumast ou à d'autres leurs envolées lyriques. Ce qui est à vrai dire gênant dans cette présentation des événements, c'est plutôt que l'on occulte le fait suivant : la bataille de Nancy n'est pas le résultat du patriotisme lorrain, mais en est devenue a posteriori l'acte fondateur. De Gergovie au Champ des Merles, aucun conflit fondateur ne peut se comprendre si l'on ne s'interroge au préalable sur le réel rapport qu'entretient ce type d'événement avec le sentiment patriotique, à savoir que celui-ci se nourrit de celui-là au moins autant qu'il en est le moteur.
Cette nécessaire mise au point apportée, il devient possible d'examiner sereinement le conflit entre la Bourgogne de Charles le Téméraire [Rappelons que ce surnom, consacré par l'historiographie moderne et que nous emploierons à notre tour, ne fut jamais porté de son vivant par Charles de Bourgogne. Thomas Basin le lui appliquait certes déjà dans son Histoire de Louis XI, mais l'usage n'en est devenu régulier qu'à partir du XVIIIe siècle.] et la Lorraine. N'a-t-on pas trop souvent sous-estimé les fidélités dynastiques, ou même personnelles, en insistant systématiquement sur la notion de patriotisme ? C'est dire à quel point les travaux de Jean Schneider furent les bienvenus lors du cinquième centenaire de la bataille. En s'attachant à examiner les faits dans le détail, le doyen Jean Schneider, s'appuyant sur un riche corpus de sources, dont il a rassemblé dans le recueil Lorraine et Bourgogne une grande partie, jusqu'alors inédite, a renouvelé le regard porté sur l'affrontement entre la Lorraine et la Bourgogne. Alors que le "parti bourguignon" [Nous préférons pour notre part utiliser l'expression, certes moins concise, "partisans de Charles le Téméraire"; cela permet, d'une part, d'éviter la confusion avec le parti bourguignon du début du XVe siècle (notamment à Paris), dont les données socio-politiques n'ont rien de commun avec le groupe qui nous occupe, et d'autre part, de ne pas tomber dans l'erreur consistant à voir en celui-ci un "parti de l'étranger", une nébuleuse de traîtres. Parler d'un "parti bourguignon" équivaut, peu ou prou, à minimiser son caractère lorrain.] était généralement perçu et présenté par les historiens du XIXe siècle, d'Henri Lepage à Christian Pfister, comme une minorité de traîtres qu'auraient rassemblés des intérêts personnels convergeants, ces nouveaux travaux apportèrent une vision différente des défections, et confirmèrent les intuitions d'Emile Duvernoy, qui ne les dissociait pas du comportement général de la chevalerie lorraine, flattée par le Téméraire , ou encore d'Henri Lepage lui-même qui, cherchant des excuses aux "traîtres", afin sans doute de minimiser la division du pays, écrivait :
« Si l'on se place au point de vue purement politique, on comprendra les défections dont René II eut à gémir : le duc de Bourgogne paraissait si redoutable, et la cause du prince légitime tellement désespérée, que beaucoup d'hommes, plus soucieux de l'intérêt que de l'honneur, ne devaient pas hésiter entr'eux. La Lorraine, d'ailleurs, ne semblait-elle pas avoir tout à gagner en passant sous la domination d'un souverain dont la puissance balançait même celle de Louis XI.
C'est un éternel titre de gloire pour notre pays d'être resté fidèle en dépit des dangers qu'il y avait à courir ; mais on se demande malgré soi ce que la Lorraine, ce que Nancy surtout seraient devenus, si Charles-le-Téméraire, au lieu de succomber dans la lutte, en était sorti victorieux.
Ces idées vinrent-elles à quelques-uns de ceux qui abandonnèrent la cause nationale? ne rêvèrent-ils pas un accroissement de grandeur pour leur pays, et n'obéirent-ils pas à un autre sentiment que l'égoïsme ou l'ambition? Je veux le supposer, afin que l'Histoire n'ait pas le droit d'imprimer une souillure éternelle à leurs noms. »
Dans tous les cas, on en conviendra aisément, il ne s'agit pas de juger mais de comprendre. Comprendre comment, à l'automne 1475, la Lorraine a pu tomber comme un fruit mûr dans les mains du Téméraire.
Or, si les liens politiques sont, d'une manière générale, trop complexes pour être réductibles à quelque déterminisme ou à quelque équation, ce truisme vaut sans doute plus encore pour la Lorraine. Les principautés y sont si imbriquées — on s'y dispute parfois la souveraineté sur une fraction de seigneurie pendant des siècles —, les réseaux de fidélité si enchevêtrés, qu'il est impossible de dégager une tendance d'ensemble sans examiner les divers cas dans le détail. D'autre part, et cela tient moins à notre région qu'à la diplomatie de cette fin de Moyen Age — qui est déjà l'art décrit par Machiavel, et avant lui par Commynes —, les équilibres, les alliances, sont trop instables pour que l'on se dispense d'examiner les situations en suivant le fil des événements.
Parce que l'intérêt de la Bourgogne — l'Etat bourguignon — pour la Lorraine — le pays lorrain, et pas seulement le duché — ne date pas de l'avènement du Téméraire, nous estimons utile d'exposer pour commencer les relations entre ces deux provinces avant cet avènement. Tout d'abord, les événements des quarante premières années du XV e siècle, relatifs à la lutte entre Orléanistes et Bourguignons transportée en Lorraine, et aux successions de Lorraine et de Bar, pour deux raisons principales : d'une part, il s'agit là des premières ingérences bourguignonnes d'importance en Lorraine ; d'autre part, l'arrivée de la maison d'Anjou à la tête des duchés et l'établissement d'un gouvernement aristocratique qui ne dit pas son nom déterminent très fortement la situation politique avec laquelle le Téméraire saura jouer. Ensuite, nous relèverons les jalons de l'influence bourguignonne dans les évêchés lorrains, posés par la diplomatie de Philippe le Bon. Enfin, pour clore ce prélude, nous nous pencherons sur l'installation au cœur de la Lorraine de la maison comtoise de Neufchâtel, épine bourguignonne dans le pied des ducs angevins.
En second lieu sera abordée l'évolution de l'implication bourguignonne en Lorraine lors des premières années du gouvernement du Téméraire : les liens renforcés avec le duc de Lorraine et les évêchés de Metz et Verdun ; un aspect plus structurel, le glissement vers la vassalité bourguignonne d'un certain nombre de familles lorraines ; enfin, la guerre entre le Conseil de Lorraine et la maison de Neufchâtel.
Nous nous pencherons ensuite sur les quatre premières années de la décennie 1470, où l'on voit la Lorraine glisser vers un statut de protectorat bourguignon.
Enfin, nous nous attacherons aux deux dernières années de la vie du Téméraire, où la politique du roi de France conduit la Lorraine à la guerre, à la soumission à la Bourgogne et enfin, à la chute du parti bourguignon.
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Conclusion
Il est courant de dénigrer les entreprises de Charles le Téméraire, sous prétexte que le dernier duc de Bourgogne aurait été moins prudent que son père, ou moins habile politicien que son rival Louis XI.
Pourtant, il est difficile de pas voir le coup de maître joué par le Téméraire en Lorraine. Dans cette région essentielle pour les liaisons internes de l'Etat bourguignon, Philippe le Hardi et Jean sans Peur avaient déjà su s'opposer efficacement aux projets du duc d'Orléans destinés à couper celles-ci. Philippe le Bon était allé plus loin, en profitant de troubles internes au duché de Lorraine pour lui imposer son ombre tutélaire. Il avait prolongé ce succès en renforçant le parti bourguignon dans les évêchés lorrains, tandis que son maréchal Thiébaut de Neufchâtel construisait au cœur du duché une principauté autonome autour de l'inexpugnable forteresse de Châtel.
Charles le Téméraire, dès son avènement, et même dès les dernières années du règne de son père, était allé plus loin. Il entraîna dans la Guerre du Bien Public le duc Jean de Calabre dont il sut se faire un ami — ce qui n'empêcha pas les coups bas —, il révisa la politique allemande de son père — ce qui lui causa plus tard des ennuis, mais qui sur l'instant fut bénéfique — et renforça notablement l'influence bourguignonne dans les évêchés. Il parvint à gérer la situation périlleuse dans laquelle aurait pu le placer le conflit entre le duc de Lorraine, son allié, et le seigneur de Neufchâtel.
Surtout, il comprit ce qu'était la noblesse lorraine. Conscient du parti qu'il pouvait tirer des nombreux seigneurs lorrains qui étaient ses vassaux pour des terres luxembourgeoises, le Téméraire joua habilement avec la Seigneurie lorraine, ce corps constitué, jaloux de ses prérogatives, et qui se sentit floué par René II, ce jeune prince, plus Joinville que Vaudémont, à qui elle avait donné la couronne ducale et qui semblait vouloir imposer une administration angevine.
Sous la forme d'une alliance fort inégale, un protectorat fut imposé par le Bourguignon, qui appela les principaux gentilshommes du duché à garantir le traité. Ceux-ci ne purent qu'être flattés par une telle reconnaissance de leur importance. Quand leur jeune duc renia son alliance sans les consulter, leur orgueil et leur honneur furent blessés. Le manifeste que leur adressa le Téméraire, particulièrement efficace et bien ciblé, eut alors vraisemblablement un impact décisif : la noblesse de son duché restant globalement passive, René II ne pouvait compter quasiment que sur l'appui militaire français, et quand Louis XI fit une fois de plus volte-face, le duc de Lorraine perdit pied, et bientôt espoir : Charles le Téméraire, rentrant triomphalement à Nancy, fut acclamé comme duc de Lorraine par les Etats Généraux, à qui l'on promettait de faire de leur pays le cœur de l'Etat bourguignon, le plus riche et le plus prestigieux qui existât.
L'historiographie "officielle" — principalement la Chronique de Lorraine et le Dialogue de Jean Lud —, commandée par René II quelques années plus tard, ne parvint pas, malgré ses efforts, à dissimuler l'ampleur des défections — ce qui, d'ailleurs, ne nuisit pas au rôle qu’elle joua dans le développement d'un patriotisme lorrain. Sauf dans quelques cas, René II fit après sa victoire preuve de clémence. Eut-il pu agir autrement, alors que quasiment toutes les forces vives du pays avaient rallié, à un moment ou à un autre, le Téméraire ?
Celui-ci était en effet parvenu à séduire : une large part de la noblesse, pour les raisons qu'on a dites ; de nombreux officiers ducaux, surtout après que René II retiré à Joinville eut semblé abandonner la lutte ; des bourgeois, ravis d'avoir un prince puissant capable de rendre les routes sûres, mais peut-être plus circonspects quand celui-ci commença à lever de lourds impôts ; un clergé bienveillant, influencé par des évêques ouvertement pro-bourguignons, et par une papauté qui voyait en la Bourgogne le dernier espoir qu'une nouvelle croisade devînt un jour réalité.
Si le Téméraire échoua finalement, la Lorraine n'en fut pas la cause. Au contraire, y eût-il consacré plus d'attention encore, se fût-il concentré sur elle en y restant en personne, au lieu d'aller combattre les Suisses, avec qui il aurait pu s'entendre — mais il méprisait ces "montagnards" —, que son Etat désormais d'un seul tenant aurait fort bien pu survivre.
René II, il faut bien lui accorder ce mérite, sut retrouver l'adhésion de ses élites et de sa population — population qui n'avait jamais cessé de se méfier de ces Bourguignons qui lui avaient causé tant de tort au cours des guerres précédentes.
Toutefois, il est permis de penser que les graines semées par le Téméraire ne furent pas stériles. En effet, même si la lutte entre René II et la Bourgogne, désormais représentée par la maison d'Autriche, se poursuivit après la mort du Téméraire — son « ennemi capital » —, la Lorraine allait bientôt entrer dans une période de son histoire dont l'alliance autrichienne serait l'un des traits marquants.
En août 1542, à Nuremberg, quand Ferdinand de Habsbourg, au nom de son frère Charles Quint, signa avec le duc Antoine, fils de René II, un traité qui plaçait la Lorraine, « duché libre et indépendant », sous la protection du Saint Empire, c'est-à-dire de la maison d'Autriche, l'ombre de Charles le Téméraire, figure qui obsédait ses arrière-petits-fils, ne planait-elle pas sur la rencontre ?
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Table des matières
SOMMAIRE 2
INTRODUCTION 3
SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE 6
I. ABREVIATIONS UTILISEES 6
II. SOURCES 6
III. BIBLIOGRAPHIE 7
CHAPITRE PREMIER : LORRAINE ET BOURGOGNE AVANT CHARLES LE TEMERAIRE 10
I. ORLEANISTES ET BOURGUIGNONS EN LORRAINE 11
1. L'influence grandissante du duc d'Orléans en Lorraine 11
2. Le ressaisissement du camp bourguignon 12
3. D'Azincourt au traité de Troyes 13
II. LES SUCCESSIONS DE BAR ET DE LORRAINE 14
1. Le traité de Foug 14
2. Les ambitions d'Antoine de Vaudémont 15
3. La bataille de Bulgnéville et ses suites 17
III. JALONS DE L'INFLUENCE BOURGUIGNONNE DANS LES EVECHES 21
1. L'évêché de Verdun 21
2. L'évêché de Toul avant 1460 22
3. L'évêché de Metz 22
IV. L'INSTALLATION DE LA MAISON DE NEUFCHATEL EN LORRAINE 23
1. Un mariage fructueux 23
2. Une puissance montante au cœur de la Lorraine 24
3. Thiébaut IX de Neufchâtel, maréchal de Bourgogne et feudataire lorrain insoumis 25
4. Mainmise sur l'évêché de Toul 26
5. Vues de Thiébaut IX sur Epinal 27
CHAPITRE II : LES DEBUTS DU GOUVERNEMENT DU TEMERAIRE ET LE RENFORCEMENT DE L'IMPLICATION BOURGUIGNONNE EN LORRAINE 29
I. LA LORRAINE ATTIREE DANS L'ORBITE BOURGUIGNONNE 29
1. Jean de Calabre dans la Ligue du Bien Public 29
2. La politique allemande du Téméraire et le ralliement de Georges de Bade 31
3. Lutte d'influence autour de l'évêché de Verdun 32
II. DES LIGNAGES LORRAINS DE PLUS EN PLUS LIES A LA BOURGOGNE 34
1. La famille de Beaufremont 34
2. Le cas des Haraucourt 36
3. La Lorraine thioise dans la mouvance luxembourgeoise 37
III. LA GUERRE DE CHATEL 38
1. L'ouverture des hostilités 38
2. La contre-offensive ducale 39
3. L'enlisement du conflit 41
CHAPITRE III : VERS UN PROTECTORAT BOURGUIGNON 42
I. LE DUC NICOLAS DANS LA CLIENTELE BOURGUIGNONNE 43
1. Le traité d'Arras et le projet de mariage 43
2. Opérations militaires communes 44
3. Le règlement de la guerre de Châtel 44
II. LA CITE ET L'EVEQUE DE METZ 46
1. La position délicate des Messins 46
2. L'alliance de Georges de Bade 46
III. CHARLES DE BOURGOGNE ET LE JEUNE RENE II 47
1. Les débuts incertains et maladroits de René II 47
2. Le traité "de Nancy" (15 octobre 1473) 48
CHAPITRE IV : LA GUERRE 51
I. LA CONCURRENCE FRANÇAISE A L'OUEST 51
1. L'héritage du roi René 51
2. Intrigues verdunoises 51
3. Le retournement de René II 52
II. LA CONQUETE DU DUCHE DE LORRAINE 53
1. Une faible résistance 54
2. La soumission et les Etats du 18 décembre 1475 57
3. Le gouvernement bourguignon de la Lorraine 62
III. LA CHUTE DU PARTI BOURGUIGNON 63
1. Les résistances à la reconquête de René II 64
2. La bataille de Nancy 66
3. Le temps des comptes 67
CONCLUSION 70
ANNEXES 72
GENEALOGIE SIMPLIFIEE DES SIRES DE NEUFCHATEL 72
GENEALOGIE SIMPLIFIEE DE LA MAISON DE HARAUCOURT 73
TRAITE "DE NANCY" (15 OCTOBRE 1473) 74
MANIFESTE DE CHARLES LE TEMERAIRE A LA NOBLESSE LORRAINE A LA SUITE DU DEFI DE RENE II 77
1. Copie éditée par Dufourny 77
2. Copie éditée par Huguenin 80
DISCOURS DE CHARLES LE TEMERAIRE AUX ETATS DE LORRAINE (NANCY, 18 DECEMBRE 1475) 84
INDEX DES NOMS DE PERSONNES 85
TABLE DES MATIERES 89
Citer :
Discours de Charles le Téméraire aux Etats de Lorraine réunis à Nancy le 18 décembre 1475
Selon la Chronique de Lorraine, éd. MARCHAL, pp. 183-185 (chapitre CXXXIX).
"«Por l'advenir bon prince vous seray, tous noblement vous entretenray. J'ay l'intention de bien entretenir l'Estat de l'Eglise, et après toute la noblesse, par moy seront tous honorés, et tous les bourgeois riches les feray, tous les laboureurs de force les garderay [i.e. : contre toutes les violences qui pourraient être faites contre eux] ; à l'ayde de Dieu céans une notable maison feray faire, avec ce, la ville feray regranser [agrandir] jusque vers le gué de Tomblaine. J'ay voluntey icy demeurer et mes jours y parfiner [achever] , c'est le pays lequel plus désire. Je suis maintenant emmy mes pays por aller et por venir. J'y tanray mon Etat, car j'ay intention que tous mes pays, Bourgoigne et Comté, Flandres et Brabant, Hollande, Zélande, Namur, Artoys, Héna, Limbourg et Lucembourg, de tous mesdicts pays feray tous les officiers venir icy rendre leurs comptes, et plusieurs de mes affaires ; à ce lieu icy feray tous venir. Je vous admoneste que me soyez bons subjects et que de moy vous reprenez ; croyez à vray que un bon prince me treuverez. Vous sçavez que je suis redoubté, et j'ay puissance à vous bien garder, car maintenant je suis entre Alemaigne et France, plus fort que devant. Tous me craindront, ils cognoissent que je suis puissant. Et por vous advertyr, contre roys et princes j'ay bonne paix et la vols maintenir, excepté contre les Suysses que à mon cousin, comte de Romont l'ont fort persecuté, dont j'ay intention dedans ce moys de febvrier de le vengier. A l'ayde de Dieu, la comté de Farette recouvreray. Por vous bien entretenir et por bien gouverner, Monsr de Bièvre, mon bon cousin, vous laisseray jusqu'à tant que reviendray. Je vous prye tous en général que il vous plaise à luy obéyer, il est homme de bien por vous maintenir ; ainsi vous le promettez.» Chascun crya : Oy. Ains en y eut que [bien] altrement désyroient."