Je confirme, comme l'ont dit plusieurs participants au débat, que la présence de soldats Noirs dans les armées napoléoniennes était quasiment inexistante. N'oublions pas que la France de cette époque ne possède absolument pas l'empire colonial africain qu'elle explore et conquiert pendant la seconde moitié du XIXème siècle et le début du XXème siècle. Il n'y a donc aucun parallèle à faire avec les deux guerres mondiales du XXème siècle. La question ne se posait même pas pour Napoléon. Mais la couleur de peau n'aurait pas constitué un obstacle pour lui, car il jugeait avant tout les hommes sur leurs qualités personnelles.
Concernant l'escadron de Mamelouks que Bonaparte créa et ramena d'Egypte, Paul Cottin en a fait en 1902 le relevé individuel sur la base des archives militaires, et a publié leur liste en annexe du livre des Mémoires de Roustam qu'il a publiées. Il a retiré de cette liste tous les soldats originaires de France, et il reste alors 258 noms de soldats d'origine orientale, sur les 552 qui constituaient l'escadron. Cette liste mentionne d'ailleurs ceux parmi eux qui étaient Noirs...et ils n'étaient que 9 en tout.
Tous ces soldats ont suivi normalement sur le continent européen la suite des campagnes napoléoniennes, au sein de la Garde impériale. Beaucoup ont fait 12 années de campagne. un grand nombre d'entre eux a disparu dans les neiges de la terrible campagne de Russie de 1812.
En ce qui concerne la compagnie de Mamelouks, telle qu'elle fut réorganisée en 1806 au sein des chasseurs à cheval de la Garde impériale, le règlement édicté par Napoléon n'empêchait pas que des indigènes puissent accéder aux grades inférieurs, ni même supérieurs. Parmi le 8 maréchaux des logis, il est indiqué seulement qu'il devait y avoir (au moins) deux Français. Deux Français également parmi les 12 brigadiers. Aucune précision de ce type pour les officiers supérieurs.
On peut citer par exemple le cas de Chahin qui devint capitaine et fit toutes les campagnes jusqu'en 1813. Il reçut 35 blessures et sauva la vie du général Rapp à Austerlitz. Il fut fait chevalier de la Légion d'honneur en 1804, puis officier en 1806 et reçut une dotation de 500 f en 1808. Il mourut de sa belle mort à la retraite à Melun, en 1838.
Le Syrien Jacob Habaïby devint même colonel ; lors des cent Jours, il commandait la place de Melun et la 1ère division militaire.
Ajoutons enfin que de nombreuses familles de mamelouks ou de réfugiés quittèrent l'Egypte en même temps que les Français et s'installèrent en France, avec des secours financiers octroyés par Napoléon. D'abord à Melun, ils furent ensuite envoyés à Marseille où ils constituèrent une petite colonie.
Ils vécurent tranquillement sous Napoléon, mais beaucoup d'entre eux furent massacrés par la population royaliste de Marseille à la chute de l'empereur en 1814.
Un dernier mot sur Roustam : il était né en Géorgie (son père était Géorgien et sa mère Arménienne), donc en fait d'origine européenne "orientale" (il était de religion chrétienne). Sa tombe est toujours visible au cimetière de Dourdan (Essonne), à 50 kms de Paris, là où il termina sa vie en 1845.