Vézère a écrit :
J'ajouterai: une pensée politique qui n'a pas varié.
Si, si.
Mais oui, absolument !
C'est tout à fait ça.
Citer :
Je provoque un peu, mais c'est ce que je retire des deux livres de Waresquiel le prince immobile et dernière nouvelles du diable.
Talleyrand est fondamentalement:
- un homme des Lumières,
- attaché à la paix en Europe
- fan du parlementarisme à l'anglaise
Je ne sais plus si j'ai lu le premier (c'est une habitude chez moi de ne pas connaître mes sources. En tous cas, une biographie.) mais en gros c'est ça.
Talleyrand, pour faire simple, est partisan d'un juste milieu : les réformes de la Constituante, ou de Napoléon 1er Consul, lui conviennent parfaitement. Il abhorre les extrémistes et les autocrates - surtout lorsqu'ils mettent le feu à l'Europe.
Wiki résume mieux que moi sa doctrine :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles-Maurice_de_Talleyrand-P%C3%A9rigord#DoctrineEn somme, dans une époque troublée, passant de l'extrême gauche (la Terreur) à l'extrême droite (La Terreur Blanche et les ultras) et par toutes les couleurs intermédiaires, Talleyrand incarne ce que pourrait être un régime stable, appelé à durer.
S'il a trahi Napoléon, ce n'est qu'après lui avoir conseillé la modération en tous domaines, ou presque. (Mais Napoléon ignore le sens du mot : ça le perdra !)
On connait sa réponse à Louis-Philippe, qui lui faisait remarquer que tous les régimes qu'il avait servis s'étaient écroulés. De mémoire : "Sire je n'y peux rien. C'est quelque chose en moi qui porte malheur aux gouvernements qui me négligent."
En fait, c'est l'absence de modération qui a tué tous ces régimes successifs. Et donc, effectivement, ils négligeaient la vision du monde de Talleyrand.
Citer :
Tant qu'un gouvernement tend vers ces trois objectifs, ou laisse à penser qu'il peut aller vers ces trois objectifs, Talleyrand le soutient.
Quand le gouvernement vient à s'en éloigner, Talleyrand le trahit.
Mais s'il trahit et se parjure à tire-larigot, lui-même ne varie pas.
C'est bien le point.
En passant, je conseille de lire tous les bons mots (exacts ou apocryphes) de Talleyrand, ou sur Talleyrand :
Ainsi de ce mot qui a couru tout Paris à sa mort :
Citer :
Ainsi, une anecdote circule à l'époque selon laquelle, Louis-Philippe étant venu le voir sur son lit de mort, Talleyrand lui aurait dit : « Sire, je souffre comme un damné. » « Déjà ! » aurait murmuré le roi. Le mot est invraisemblable, mais il a couru très tôt. L'anecdote rappelle ce mot par lequel le Diable aurait accueilli Talleyrand en enfer : « Prince, vous avez dépassé mes instructions »
Ma citation préférée de Talleyrand, et je l'utilise souvent dans la vie : "Il ne faut pas confondre les détails et l'accessoire." C'est très fin, comme observation. Il y a des "détails" qui tuent ("le diable se cache dans les détails", dit un proverbe allemand.) ou à l'inverse, pour la réussite d'un projet, il y a des détails qui cachent des points clés.
Corrompu et rempli de vices autant qu'on voudra, ce mot signe ce qu'il était : une intelligence - et une finesse à saisir les choses - exceptionnelles.