ezio-auditore a écrit :
Il semble que la Hollande ait eu sa part :
"Aucune de mes affaires n'avance. Celle de la Hollande ne fait point un pas ; présentez une note au ministre des Affaires étrangères, conformément à ma lettre au roi ; dites-lui que je ne puis laisser cette nation l'auxiliaire de l'Angleterre ; tombez sur les mauvais conseillers du roi et insistez sur la nécessité de recourir à toute la puissance que Dieu m'a donnée pour faire du mal à l'Angleterre et pour nuire à son commerce dans l'alliance qu'il a contractée avec le commerce de Hollande"
(A Champagny, duc de Cadore, le 6 janvier 1810)
Afin d'étouffer des menaces de résistance qui se manifestaient, Oudinot sur ordre de l'empereur fait une proclamation : possession militaire est prise pour les pays entre la Meuse et l'Escaut. Résistance des Hollandais.
"Rendez-vous chez le roi pour lui faire connaître que s'il ne remédie pas à l'affront qui a été fait à mes troupes, je les ferai marcher sur Amsterdam et que je déclarerai la réunion de la Hollande à la France. Vous lui direz que mes troupes venaient occuper militairement ces places et que je suis le maître de les faire entrer dans Berg-op-Zoom et Breda qui ont toujours été dans les mains de mes armées ; que c'est à lui de prescrire des mesures sans quoi il sera responsable du sang qui coulera."
(A Clarke, duc de Feltre, 18 janvier 1810)
Il apparait pourtant que tout est scellé car dans des instructions secrètes, Napoléon faisait connaître à Oudinot sa pensée irrévocable de réunir les pays entre la Meuse et l'Escaut à la France
On peut à ce sujet à la menaçante lettre du 21 décembre 1809 :
« Monsieur mon frère, je reçois la lettre de V. M. Elle désire que je lui fasse connaître mes intentions sur la Hollande; je le ferai franchement. Quand V. M. est montée sur le trône de Hollande, une partie de la nation hollandaise désirait la réunion à la France; l'estime que j'avais puisée dans l'histoire pour cette brave nation m'a porté à désirer qu'elle conservât son nom et son indépendance. Je rédigeai moi même sa constitution, qui devait être la base du trône de V. M., et je l'y plaçai. J'espérais qu'élevée près de moi, elle aurait eu pour la France cet attachement que la nation a droit d'attendre de ses enfants, et à plus forte raison de ses princes. J'espérais qu'élevée dans ma politique, elle aurait senti que la Hollande, qui avait été conquise par mes peuples, ne devait son indépendance qu'à leur générosité; que la Hollande, faible, sans alliance, sans armée, pouvait et devait être conquise le jour où elle se mettrait en opposition directe avec la France; qu'elle ne devait point séparer sa politique de la mienne; qu'enfin la Hollande était liée par des traités avec la France. J'espérais donc qu'en plaçant sur le trône de Hollande un prince de mon sang, j'avais trouvé le mezzo termine qui conciliait les intérêts des deux états, et les réunissait dans un intérêt commun, et dans une haine commune contre l'Angleterre; et j'étais tout fier d'avoir donné à la Hollande ce qui lui convenait, comme par mon acte de médiation j'avais trouvé ce qui convenait à la Suisse. Mais je n'ai pas tardé à m'apercevoir que je m'étais bercé d'une vaine illusion : mes espérances ont été trompées. V. M., en montant sur le trône de Hollande, a oublié qu'elle était Française, et a même tendu tous les ressorts de sa raison, tourmenté la délicatesse de sa conscience, pour se persuader qu'elle était Hollandaise. Les Hollandais qui inclinaient pour la France ont été négligés et persécutés; ceux qui ont servi l'Angleterre ont été mis en avant. Les Français, depuis l'officier jusqu'au soldat, ont été chassés, déconsidérés; et j'ai eu la douleur de voir, en Hollande, sous un prince de mon sang, le nom français exposé à la honte. Cependant je porte dans mon cœur, j'ai su soutenir si haut, sur les baïonnettes de mes soldats, l'estime et l'honneur du nom français, qu'il n'appartient ni à la Hollande ni à qui que ce soit d'y porter atteinte impunément. Les discours émanés de V. M. à sa nation se sont ressentis de ces mauvaises dispositions. On n'y voit que des allusions sur la France; au lieu de donner l'exemple de l'oubli du passé, ils le rappellent sans cesse, et par là flattent les sentiments secrets et les passions des ennemis de la France. Eh ! cependant, de quoi se plaignent les Hollandais ? n'ont-ils pas été conquis par nos armes ? ne doivent-ils pas leur indépendance à la générosité de mes peuples ? ne devraient-ils pas plutôt bénir la générosité de la France, qui a constamment laissé ouverts ses canaux et ses douanes à leur commerce, qui ne s'est servi de la conquête que pour les protéger, et qui n'a fait, jusqu'à cette heure, usage de sa puissance que pour consolider leur indépendance ? Qui a donc pu justifier la conduite, insultante pour la nation et offensante pour moi, qu'a tenue V. M. ? Vous devez comprendre que je ne me sépare pas de mes prédécesseurs, et que, depuis Clovis jusqu'au comité de salut public, je me tiens solidaire de tout, et que le mal qu'on dit de gaîté de cœur contre les gouvernements qui m'ont précédé, je le tiens comme dit dans l'intention de m'offenser. Je sais qu'il est venu de mode, parmi de certaines gens, de faire mon éloge et de décrier la France; mais ceux qui n'aiment pas la France ne m'aiment pas : ceux qui disent du mal de mes peuples, je les tiens pour mes plus grands ennemis. N'aurais-je eu que cette seule raison de mécontentement, de voir le mépris dans lequel était tombé le nom français en Hollande, que les droits de ma couronne m'autoriseraient à déclarer la guerre à un souverain, mon voisin, dans les états duquel on se permettrait des insultes contre mes peuples : je n'en ai rien fait.
Mais V. M. s'est fait illusion sur mon caractère; elle s'est fait une fausse idée de ma bonté et de mes sentiments envers elle. Elle a violé tous les traités qu'elle a faits avec moi; elle a désarmé ses escadres, licencié ses matelots, désorganisé ses armées ; de sorte que la Hollande se trouve sans armée de terre ni de mer, comme si des magasins de marchandises, des négociants et des commis pouvaient consolider une puissance. Cela constitue une association ; mais il n'est pas de roi sans finances, sans moyens de recrutement assurés, et sans flotte.
V. M. a fait plus; elle a profité du moment où j'avais des embarras sur le continent pour laisser renouer les relations de la Hollande avec l'Angleterre, violer les lois du blocus, seul moyen de nuire efficacement à cette puissance. Je lui ai témoigné mon mécontentement de cette conduite, en lui interdisant la France, et je lui ai fait sentir que sans le secours de mes armées, en fermant le Rhin, le Weser, l'Escaut et la Meuse à la Hollande, je la mettais dans une position plus critique que si je lui eusse déclaré la guerre, et je l'isolais de manière à l'anéantir.
Ce coup a retenti en Hollande. V. M. a imploré ma générosité, et en a appelé à mes sentiments de frère, a promis de changer de conduite: j'ai pensé que cet avertissement serait suffisant; j'ai levé la prohibition de mes douanes; mais bientôt V. M. est revenue à son premier système. Il est vrai qu'alors j'étais à Vienne, et j'avais une pesante guerre sur les bras. Tous les bâtiments américains qui se présentaient dans les ports de Hollande, tandis qu'ils étaient repoussés de ceux de France, V. M. les a reçus. J'ai été obligé une seconde fois de fermer mes douanes au commerce hollandais : certes, il était difficile de faire une déclaration de guerre plus authentique. Dans cet état de choses, nous pouvions nous regarder réellement en guerre. Dans mon discours au corps-législatif, j'ai laissé entrevoir mon mécontentement, et je ne vous cacherai pas que mon intention est de réunir la Hollande à la France, comme complément de territoire, comme le coup le plus funeste que je puisse porter à l'Angleterre, et comme me délivrant des perpétuelles insultes que les meneurs de votre cabinet ne cessent de me faire. En effet, l'embouchure du Rhin et celle de la Meuse doivent m'appartenir. Le principe, en France, que le thalweg du Rhin est notre limite, est un principe fondamental. V. M. m'écrit, dans sa lettre du 17, qu'elle est sûre de pouvoir empêcher tout commerce de la Hollande avec l'Angleterre; qu'elle peut avoir des finances, des flottes, des armées; qu'elle rétablira les principes de la constitution en ne donnant aucun privilège à la noblesse, en réformant les maréchaux, grade qui n'est qu'une caricature et qui est incompatible avec une puissance du second ordre; enfin qu'elle fera saisir les entrepôts de marchandises coloniales et tout ce qui est arrivé sur des bâtiments américains qui n'auraient pas dû entrer dans ses ports. Mon opinion est que V. M. prend des engagements qu'elle ne peut pas tenir, et que la réunion de la Hollande à la France n'est que différée. J'avoue que je n'ai pas plus d'intérêt à réunir à la France les pays de la rive droite du Rhin, que je n'en ai à y réunir le grand duché de Berg et les villes hanséatiques. Je puis donc laisser à la Hollande la rive droite du Rhin, et je lèverai les prohibitions données à mes douanes, toutes les fois que les traités existants et qui seront renouvelés, seront exécutés. Voici mes intentions.
1° L'interdiction de tout commerce et de toute communication avec l'Angleterre.
2° Une flotte de quatorze vaisseaux de ligne, de sept frégates, et de sept bricks ou corvettes armées et équipées.
3° Une armée de terre de vingt-cinq mille hommes.
4° Suppression des maréchaux.
5° Destruction de tous les privilèges de la noblesse, contraires à la constitution que j'ai donnée et que j'ai garantie.
V. M. peut faire négocier sur ces bases avec le duc de Cadore, par l'entremise de son ministre; mais elle peut être certaine qu'au premier paquebot, qu'au premier bâtiment qui sera introduit en Hollande, je rétablirai la défense des douanes; qu'à la première insulte qui sera faite à mon pavillon, je ferai saisir à main armée, et pendre au grand mât, l'officier hollandais qui se permettra d'insulter mon aigle. V. M. trouvera en moi un frère, si je trouve en elle un Français; mais si elle oublie les sentiments qui l'attachent à la commune patrie, elle ne pourra trouver mauvais que j'oublie ceux que la nature a placés entre nous. En résumé, la réunion de la Hollande à la France est ce qu'il y a de plus utile à la France, à la Hollande, au continent; car c'est ce qu'il y a de plus nuisible à l'Angleterre. Cette réunion peut s'opérer de gré ou de force. J'ai assez de griefs contre la Hollande pour lui déclarer la guerre. Toutefois je ne ferai pas de difficulté pour me prêter à un arrangement qui me cédera la limite du Rhin, et par lequel la Hollande s'engagera à remplir les conditions stipulées ci-dessus. »