Pierma a écrit :
J'ai lu ça dans "Austerlitz" un récit captivant de la bataille (et de son cadre international) par Claude Manceron.
Je n'ai rien à ajouter : Cyril a cité ce que j'avais en tête.
Peut-être remettre le contexte pour ne pas trop charger FG.
Les armées d'Alexandre 1er étaient aux frontières de la Prusse et semblaient obliger le roi à faire partie de la coalition (Metternich). Alexandre insiste via Dolgorouki :
"Retournez auprès de l'empereur votre maître, annoncez lui ma résolution inébranlable. Je vous enverrai sans délai une lettre confirmative." (Metternich)
FG veut rester neutre. Il apprend que les troupes de Napoléon sont entrées à Anspach le 3 octobre :
"Les choses ont changé de face. Allez de ce pas chez le prince Dolgorouki. Je le chargerai d'une lettre par laquelle j'annonce à l'empereur que je lui ouvre les frontières de mon royaume" (Metternich).
A Berlin, l'arrivée des Français à Anspach déchaîne les passions, les militaires veulent défendre le territoire de la patrie.
7 octobre : il est décidé (Conseil des Ministres) que la Prusse est déliée de tout engagement vis à vis de la France, libre passage sera accordé aux troupes russes.
9 octobre : le conseil se prononce pour la neutralité armée.
Hardenberg à Laforest : "SM ne sait si elle doit s'étonner davantage des violences que les armées françaises se sont permises dans ses provinces ou des arguments inconcevables par lesquels on prétend les justifier. Le roi se considère comme libre de toute obligation antérieure au moment présent. Il n'a plus d'autres devoirs que sa propre sûreté et de la justice universelle..."
Hardenberg ordonnait dans le même moment à Brunswick de s'emparer du Hanovre. Raté. FG est encore plus décontenancé. Le tsar se rend à Berlin pour pousser la Prusse.
C'est ensuite que Napoléon propose de donner le Hanovre au roi de Prusse. L'offre n'est valable que deux semaines.
FG hésite toujours et se voit en médiateur. Metternich à Hardenberg, le 17 octobre : "Laquelle (
médiation) ? Celle que nous avons proposée dans le sens du traité du 11 avril ? Le roi a donc l'air de vouloir être médiateur dans sa propre cause ?"
Bataille d'Ulm. Napoléon à Duroc, 2 brumaire An XIV :
[Le but pour lequel vous restiez à Berlin est manqué puisqu'il n'est plus question d'alliance. Je ne suis pas au fait de ce qui se fait à Berlin étant depuis 15 jours sans nouvelles de M. Talleyrand et des vôtres ; mais j'entends dire partout que la Prusse est fort mal pour moi, qu'elle veut arracher mes aigles du bord de l'Elbe. Laissez entrevoir, avec ménagements, que mes aigles n'ont jamais souffert d'affronts et que nous sommes encore la même nation qui a résisté à la Prusse, à l'Autriche, à la Russie et à l'Angleterre réunies ; ne dites cela que lorsqu'il le faudra ... Dites au roi en prenant congé :
"Sire, l'Empereur me mande près de lui. Il voulait écrire à VM pour l'informer de ses succès mais il n'ose plus étant vaguement instruit, par les bruits de l'Allemagne, que ses ennemis lèvent la tête à Berlin ... Sire vous avez en l'empereur un ami capable de venir des extrémités du monde à votre secours. L'Empereur est peu connu en Europe ; c'est plus un homme de coeur encore qu'un homme politique.
Serait-il possible que VM voulût, par une conduite douteuse, aliéner un homme d'un si grand caractère et qui lui est si attaché ? L'affaire d'Anspach n'est qu'un vain prétexte ; le territoire de cette province n'est pas compris dans le traité ; ce motif a suffi au prince Ferdinand qui s'est échappé par là..."
Dites-lui ces mots d'une parole claire ... Vous y ajouterez que l'Empereur ne tient pas au Hanovre mais qu'il faut qu'on y mette les formes ... que l'empereur est l'homme du monde sur lequel les menaces ont le moins d'effet et qui s'en irrite le plus ; qu'il sait bien que Frédéric, avec la Prusse, a résisté à l'Europe entière et que tout le monde sait que l'empereur a des armées différentes de celles du Comité de Salut Public.
Le 27 octobre, Napoléon rappelle au roi de Prusse qu'il avait lui-même proposé d'accroître ses Etats de l'Electorat : "... depuis, j'ai consenti à lui (
l'Angleterre) donner le Hanovre en dépôt, et si toutes les conditions n'ont point eu son assentiment, Sire, elles n'ont point été imaginées ... tout ce qui m'offrira les moyens de regagner l'amitié et la confiance de VM, je suis prêt à le faire..."
Alexandre Ier et Metternich sont à Berlin, le 3 novembre le traité de Postdam est signé.
Citer :
Dans l'hypothèse où Napoléon lanterne la Prusse pour voir comment elle évolue (mais c'est une question que je pose) les débats à Berlin sur la position à tenir ont lieu après Austerlitz.
Il semble que l'Empereur avait déjà "évalué" la capacité de la Prusse non pas à "évoluer" mais à "se positionner". Il semble que ce soit la pire difficulté à surmonter en tant que souverain.
Après Austerlitz :
"Laforest voyait fort bien que le roi de Prusse ne voulait point s'immiscer entre la France et l'Autriche, qu'il désirait traiter de ses intérêts particuliers et qu'il voulait obtenir des avantages en compensation qu'il se montrait disposé à donner" (Rapport du 18 décembre 1805).