Themistocle a écrit :
Les votants inscrivaient leurs noms, leurs prénoms sur la fiche de vote, puis cochaient la case "oui" ou "non". On conçoit que cette mesure avait un effet dissuasif des plus forts.
Pour clarifier les choses: après vérification (d'après un numéro de 2010 de la doc' photo, une étude comparée des deux empires, rédigée par J-O Boudon), on votait sous le Second Empire par bulletins et non sur registres (sauf pour l'armée), ce qui était par contre le cas sous le Premier Empire. "Les plus forts" n'étaient donc pas systématiquement identifiés lors des votes. Cependant, seuls les bulletins des candidats officiels et les bulletins "oui" étaient imprimés, ce qui obligeait les électeurs à écrire eux-mêmes, ou à faire écrire (dans une France où 40% de la population était analphabète...), "non" ou le nom du candidat non-gouvernemental, et ce dans des bureaux de vote, sans isoloir et surveillés.
Lors des plébiscites, des électeurs n'hésitaient pas à rédiger des commentaires, souvent hostiles au régime sur leur bulletin, voire les signer de leur nom. Les bulletins deviennent alors le lieu d'une certaine liberté d'expression, ce qui peut relativiser des éventuelles répressions qui pourraient avoir lieu à la suite des scrutins. (je vous renvoie à cet intéressant article:
http://amnis.revues.org/312#bodyftn14)
Themistocle a écrit :
Quelque chose me dérange dans cette théorie d'un peuple opprimé condamné à voter pour un référendum truqué: les taux d'abstention ont été extrêmement bas, respectivement 18%, 20% et 17% des inscrits! Si l'opinion publique avait été aussi hostile envers NApoléon III: pourquoi est-ce que les Français ne se sont pas abstenus massivement?
Peut-être que cette théorie est fausse et l'"opinion" n'était pas si hostile à NIII?
Il faut bien s'imaginer que vous êtes dans une France à majorité rurale, sans opinion publique encore véritablement structurée. On vote moins pour Napoléon III que pour des figures connues et locales, c'est à dire les notables, avec tout le clientélisme que cela sous-tend. Il est manifeste que les votes n'étaient pas réguliers (il suffit de voir les résultats du plébiscite pour le rattachement de la Savoie). Mais il n'y a pas de contrainte physique systématique, c'est à dire pousser, littéralement, les électeurs vers les bureaux de vote. Il est évient, dans cette France des notables, que l'on suit le vote du maire, du châtelain, du patron...comme peut l'illustrer cette caricature connue:
http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=lyon2.2004.aubrun_j&part=86576Il n'en demeure pas moins que l'empereur reste dans les campagnes une figure globalement appréciée: les paysans bénéficient des politiques de grands travaux qui modernisent ou désenclavent les campagnes (chemins de fers, travaux d'aménagement); lorsque l'Empire naît, cela correspond aussi à une période de prospérité qui profite à la paysannerie. Donc les français, dans leur grande majorité (rurale, catholique et conservatrice), n'avaient pas de raison de montrer une véritable hostilité à un régime qui rétablit l'ordre, la prospérité et le suffrage universel.