Cette histoire terrible donne lieu, 150 ans après et en particulier ci-dessus, à une controverse : y a-t-il eu cannibalisme ? Et si oui, en paroles ("mangez-le si vous voulez"), ou réellement (graisse fondue sur du pain).
Bien que le cannibalisme soit le crime tabou suprême, il me semble que :
- savoir si oui ou non est relativement accessoire par rapport à l'horreur de l'histoire.
- prétendre trancher cette question est bien illusoire, même en recherchant dans les archives du procès. Que de telles paroles aient été prononcées devant l'horreur d'un bûcher, ce n'est pas invraisemblable. Qu'elles aient été prononcées par le maire qui s'en serait "lavé les mains" avec cette formule, pourquoi pas. Si c'est le cas, qu'il l'ait ensuite nié lors du procès, c'est évident.
Citons Alain Corbin :
Citer :
Selon Jean Maurel, un couvreur de soixante-dix-huit ans [...], les plus acharnés auraient dit à Mathieu, en parlant de la victime "alors arrêtée devant l'auberge" : "Nous voulons le tuer, le faire brûler et le manger." Le maire aurait répondu : "mangez-le si vous voulez." Ces mots terribles semblent avoir été rapidement colportés ; la femme Antony les a reproduits au procès, avant que Maurel ne témoigne. Reste qu'il s'agit d'un bruit sans grand fondement. Devant les dénégations énergiques de Mathieu, le couvreur ne maintiendra pas ses accusations.
Donc, au minimum, il a été question de le manger, dans le brouhaha de la foule en délire.
Ce qui est avéré, c'est que le maire a refusé à la victime la porte de sa maison, "de peur qu'on casse ma vaisselle" (témoignage de Campot qu'il n'a pas nié). Un autre témoignage qu'il a nié lui fait dire "Ôtez monsieur de Moneys de devant cette auberge, il gêne la circulation". En tout cas, le procès a été en grande partie celui de ce maire. Et n'oublions pas le changement de régime politique entre le crime commis au nom de l'empire et le jugement par la république.