Bref aperçu des vicissitudes des fournitures d'habillement et équipements sous le Premier Empire
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12 mars 1806
Monsieur Dejean, le 3e régiment d'infanterie légère a besoin de huit cents gibernes, de mille baudriers et de mille habits. Il y a mille hommes au dépôt de ce régiment qui sont tous nus. En frimaire dernier, vous lui aviez écrit que vous lui envoyiez des étoffes le 4 mars, il ne les avait pas encore Pegues. Faites-moi connaître ce que je puis espérer que vous ferez pour fournir à ce régiment l'habillement qui lui manque
4 septembre 1806
Mon Fils, j'ai vu, par les états de revue des dépôts de l'armée de Dalmatie que vous m'avez envoyés, qu'ils ont encore beaucoup d'hommes habillés en bourgeois. Faites disparaître au plus tôt cette inconvenance, et faites faire aux conscrits des vestes et des culottes, soit sur les fonds du royaume d'Italie, soit sur des fonds extraordinaires. Il vous en manque pour 2 ou 300 hommes. En général, il serait bon que vous eussiez en magasin des vestes et des culottes pour un millier d'hommes, pour pourvoir aux cas extraordinaires. Le ministre de la guerre d'Italie peut faire porter cette dépense, qui est peu de chose, sur son ministère; mais il ne faut pas souffrir qu'aucun soldat reste en habits bourgeois. (...) il faudra me présenter un projet de décret pour que les draps soient envoyés à Trévise ou à licence dans un des dépôts où doivent se réunir les conscrits, et prendre des mesures pour y envoyer quelques officiers, sous la surveillance immédiate du chef de l'état-major, pour veiller à la confection des habits et à leur distribution aux conscrits qui ne tarderont pas à arriver. (...)
Je vois, dans la revue des corps du Frioul, que le 35e a 108 hommes en habits bourgeois, et que le 92e en a 19. Comment cela a-t-il lieu?
Quand un conscrit arrive au corps, on lui donne une première mise de 42 francs, qui sert à lui faire faire une veste, une culotte, des souliers, etc.
Donnez sur-le-champ des ordres sur cet objet. Cette négligence est d'autant moins pardonnable que le 35e a des draps en magasin.
4 Novembre 1808
Le major général, prince de Neuchâtel, met sous les yeux de l'Empereur un rapport du sous-inspecteur aux revues sur la confection de 44,000 capotes et de 20,000 habits militaires, à Bordeaux. Il résulte de ce rapport que, par suite de l'extrême avidité de l'entrepreneur et de ses sous-traitants ,
1° les salaires des ouvriers sont insuffisants;
2° les capotes sont trop étroites, l'entrepreneur ne livrant pas aux ouvriers la quantité de drap accordée par le gouvernement;
3° l'installation des ateliers de confection est défectueuse;
4° qu'enfin une tentative de corruption, faite auprès des fabricants de drap de Lodève, a été rejetée par eux et portée à la connaissance de l'administration.
Renvoyé au grand juge pour faire arrêter, traduire devant les tribunaux et poursuivre selon la rigueur des lois les coupables, non-seulEment comme voleurs et dilapidateurs des fonds publics, mais encore comme compromettant le service de l'armée. Le major général cassera, comme frauduleux, tous les marchés faits avec ces individus. Il chargera le préfet de la Gironde et le commissaire ordonnateur à Bordeaux de se concerter pour que le service n'en souffre pas et qu'il y soit pourvu.
NAPOLÉON.
5 Novembre 1808
Vous savez que les marchés ne produisent que des friponneries. J'ai cassé le marché de l'habillement de Bordeaux. Envoyez-y un directeur qui fasse faire les habillements pour mon compte et qui fasse faire les confections, aidé du préfet qui requerra les ouvriers et les locaux., Partez bien du principe qu'on ne fait des marchés que pour voler. Quand on paye on n'a pas besoin de marché. Le système des régies est toujours meilleur. Comment faut-il s'y prendre pour faire cette confection?
Comme on fait dans les régiments. Mettez un commissaire des guerres probe à la tête de cet habillement, donnez-lui trois ou quatre maîtres tailleurs comme employés de l'atelier, et chargez trois officiers supérieurs, de ceux qui se trouvent à Bordeaux, de surveiller les réceptions, de ne recevoir que de bons habits. Il n'y a pas besoin de marchés pour tout cela, en mettant de l'argent à la disposition du commissaire des guerres. Par le décret ci-joint vous verrez qu'il suffit d'avoir un bon adjoint au commissaire des guerres, qui veuille mettre sa réputation à bien faire aller cette confection, deux bons garde-magasin et deux maîtres tailleurs sortis des corps, honnêtes et experts. Avec ces cinq individus cet atelier marchera parfaitement, et je veux avoir des objets aussi bien confectionnés que ceux de la garde. Quant à l'activité, si on veut confectionner 10.000 habits par jour, on les confectionnera, parce qu'il ne sera question que de requérir des ouvriers dans toute la France si vous aviez agi de cette manière, tout marcherait parfaitement bien. Mieux vaut tard que jamais et, pour votre règle, je ne veux plus de marché. Quand je ne ferai pas confectionner par les corps, il faudra suivre cette méthode.
27 juin 1811
Je réunis 10.000 conscrits à Bayonne Pour ceux-ci, vous adresserez les draps aux conseils d'administration qui les feront confectionner: mais quatorze autres sont retenus au camp de Bayonne, parce que leurs dépôts sont au nord; ceux-là, je désire que vous les habilliez de pied en cap. Il faut que vous leur donniez habits, vestes, culottes, souliers, guêtres, schakos, capotes, etc. Ce sera à peu près 12.000 hommes qu'il faudra habiller ainsi. Faites-moi connaître quand vous aurez les 8.000 habits, vestes et culottes que l'on confectionne à Paris. Complétez les 9.000 qui sont à Bayonne, c'est-à- dire faites faire autant de culottes et de vestes qu'il y a d'habits, ce qui fera un approvisionnement complet pour 17.000 hommes, en habits, vestes, culottes, chemises, souliers, cols, guêtres, schakos, gibernes et enfin tout ce qui constitue l'habillement d'un soldat.
La mesure de faire confectionner 4.000 habits de cavalerie légère à Bordeaux est coûteuse; tous les conseils d'administration et de cavalerie légère ont reçu, en 1810 et en 1811, des habillements des pour les escadrons qui sont en Espagne. Ils n'en ont envoyé qu'une partie
23 août 1811.
Monsieur le comte de Cessac, j'apprends que des habits qu'on a confectionnés à Bordeaux sont envoyés à Kehl. Ce mouvement me paraît mauvais, quand j'ai tant besoin d'habits pour les armées
d'Espagne. C'est dépenser de l'argent inutilement en transports. Si vous avez ordonné cet envoi de Bordeaux, donnez contre-ordre. II me vient de Toulon et de l'île de Ré des plaintes sur l'habillement faites-moi connaître ce qui en est. En général, vous confectionnez trop d'habits et les habits sont mauvais. Il faut faire confectionner par les corps; c'est la seule chose qui ait réussi. Le bureau de l'habillement ne me paraît pas encore dirigé avec l'intelligence convenable.
10 septembre 1811
Monsieur le comte de Cessac, je ne puis qu'être mécontent de votre rapport du 8 septembre sur li habillement du régiment d'Illyrie. Je vous envoie le rapport fait par le général de brigade Porson, chef de l'état-major, qui est un officier distingué. J'avais fait transcrire les plaintes qui m'étaient portées; en réponse, le bureau fait un rapport qui contient des choses vagues. Vous verrez par celui du général Porson que les habits destinés aux trois premiers bataillons n'ont pu être mis en service, parce qu'ils sont trop petits, mal faits, et que le drap n'a pu être décati. Le dos et les manches ne sont pas doublés. Qui a fait confectionner ces habits? Pourquoi le drap n'a-t-il pas été décati ? Pourquoi sont-ils trop étroits ? Pourquoi les boutonnières ne sont-elles faites que par un coup de ciseau?
Vous verrez dans le rapport que les chemises sont trop courtes pour les hommes, que les souliers ne sont d'aucun usage et ont une semelle de carton; que les havresacs sont trop petits et de mauvaise qualité; qu'enfin, il manque à ce régiment la moitié des schakos qu'il devrait avoir.
13 avril 1812
Monsieur le comte de Cessac, j'ai reçu votre rapport d'aujourd'hui sur la soumission qui vous a été faite par des fabricants du grand-duché de Berg pour une fourniture de drap. Il serait avantageux d'user de cette ressource puisque les échantillons des draps blanc, bleu et gris ont été jugés de bonne qualité. Il est probable que l'intendant général ne trouverait pas à s'en procurer d'aussi bons en Allemagne et, par conséquent, il y aurait de l'avantage à lui envoyer ces étoffes au lieu des fonds destines à acheter les matières qui se confectionneront dans l'atelier de Danzig. Mais je ne vois dans la soumission qu'une offre de fournir des draps, et il vous restera à vous procurer des tricots, des cadis et des toiles pour compléter l'assortiment nécessaire à la confection. Je vous autorise à faire,
soit dans le grand-duché de Berg, soit en France, l'achat des matières pour les effets d'habillement que, d'après mon décret du 10 mars, vous deviez envoyer en argent, c'est-à-dire, 12.000 habits, 12.000 vestes, 20.000 culottes, 12.000 capotes, 1.200 manteaux et 2.000 porte-manteaux. L'intendant général se procurera avec les fonds que vous lui enverrez les matières pour confectionner les objets d'équipement.
25 décembre 1813
Monsieur le Comte Daru, Voilà donc 200,000 hommes à habiller. Je désire que vous me fassiez un rapport le plus tôt possible sur l'habillement de ces hommes. Il faudrait, 1° prendre tous les draps qui se trouvent en France, bons et mauvais, et établir de grands ateliers à Lille en Flandre, à Metz et à Paris, de manière à faire dans ces trois places 3,000 habits complets par jour, ce qui, en soixante jours, habillerait ces 200,000 hommes. Je crois que cela serait préférable aux ateliers des corps, où tout cela se trouve trop disséminé, et exige trop de détails. En y employant quelques auditeurs, quelques bons administrateurs et quelques bons ordonnateurs, honnêtes gens, on devrait venir à bout de cela.
Napoléon en janvier 1814
Gourgaud ira voir les ateliers de confection de l'administration de la guerre; ateliers d'habillement. Combien d'habits de faits? Combien en fait-on par jour? Combien d'étoffes reçues ou à recevoir ? Savoir combien on peut habiller d'hommes avec habits et combien sans habits, mais avec capotes. Il verra la fabrique des schakos, celle des bottes, celle des selles, celle des voitures, l'équipage, caissons d'artillerie, il verra les bureaux d'artillerie, pour me faire connaître s'il n'y aurait pas moyen d'envoyer mille fusils dans les Vosges, mille du côté de Langres, enfin, si nous avons des piques pour armer les vétérans, et combien de fusils cette mesure donnerait. Gourgaud verra le ministre de la guerre pour savoir si on ne pourrait pas faire venir à Paris tous les vétérans ou invalides qui ont moins de quarante ans et qui seraient capables d'être caporaux. Il faut ordonner une visite à ce sujet dans les places de Louvain, etc., et diriger tous les hommes qui seront jugés disponibles sur Lyon, Fontainebleau et Lille, ce qui donnerait les moyens de réorganiser les cadres.