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Message Publié : 01 Nov 2011 7:09 
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persephone66 a écrit :
Aujourd'hui en 2011, le travail semble être considéré pour beaucoup de gens comme une valeur capitaliste (ump) voir parfois comme carrément réactionnaire (on rappelle souvent le fameux "travail, famille, patrie").

Votre évocation de l'UMP sort des limites chronologiques du forum. On peut néanmoins vous apportez deux nuances importantes sur ce que vous venez d'écrire :

1. Son programme politique classe l'UMP parmi les partis socio-démocrates, aussi bien historiquement (par exemple, dans la France d'avant 1950) que géographiquement (partout ailleurs dans le monde).

2. Le régime vichyste fut aussi porté et inspiré par nombre de sympathisants socialistes et certains termes qu'il véhicule (révolution nationale, travail) furent fondés et portés par les progressistes depuis 1789 au moins.
persephone66 a écrit :
Pourtant, au 19e siècle, Marx a exprimé l'idée que le travail était l'essence de l'homme et il me semble que dans mal de textes littéraires ou non de gens étiquetés comme étant "à gauche" à cette époque, loin d'être considéré comme une valeur capitaliste, le travail est opposé à l'oisiveté des possédants qui eux ne travaillent pas ou bien peu en comparaison avec l'ouvrier et qui ne font que profiter du fruit du labeur des autres.

Tout à fait, nombre de partis socialistes ayant d'ailleurs pour dénomination "parti des travailleurs" ou "parti travailliste", c'est-à-dire les partis des travailleurs et classes laborieuses.
persephone66 a écrit :
Peut on penser que les choses auraient surtout changé dans les années 1968 où l'individualisme montant et l'opinion publique (surtout les jeunes) jugeant de plus en plus l'idée de "devoir" conservatrice, la gauche aurait progressivement cessé de valoriser le travail ?

De même que je pense que la bourgeoisie est l'horizon des prolétaires (et la réalité des apparatchiks), l'oisiveté des privilégiés est devenue le programme des partis travaillistes/socialistes. On pourrait même juger que la plus grande trahison des régimes communistes est d'avoir maintenu le prolétariat dans son indigence matérielle.
persephone66 a écrit :
Pour ce qui concerne la droite, le 19e siècle serait partagé par deux tendances (la deuxième devenant peut être dominante dans la deuxième moitié) :
-l'une basée sur une conception aristocratique qui prône le mépris du travail (en gros les propriétaires terriens qui méprise ceux qui cherchent à s'enrichir mais qui ne voient aucun problème moral à profiter passivement de ce qui a été amassé par leurs ancêtres et des rentes que cela leur procure)

A l'instar d'une certaine pensée chrétienne, ce parti-là estime également que l'oisiveté engendre des vices et qu'une population bien tenue est une population qui travaille, tout comme on occupe des enfants pour éviter leurs bêtises.
persephone66 a écrit :
-l'autre qui s'apparenterait au mythe du "self-made-man" et au darwinisme social. Cette droite là valoriserait une certaine idée du mérite et du travail dont le contenu serait en total opposition avec les valeurs mérite et travail telles que se les représentent les socialistes.

Le parti du "self made man" est déjà progressiste et classé à gauche par le parti précédent. Pour les aristocrates, l'aristocratie ne doit pas travailler, j'entends qu'elle estime qu'elle peut se passer du travail pour conserver sa supériorité morale tandis que les classes inférieures doivent travailler pour ne pas péricliter moralement.

Les darwinistes sociaux (derrière les sociobiologistes) seraient inclassables en ceci qu'ils estiment que l'utilité (et non le travail) justifie l'existence ou l'inexistence des individus, mais classés à droite en celà qu'ils jugent que cette utilité est portée dans l'essence même (origines sociales, hérédité génétique...) des individus ainsi triés.
persephone66 a écrit :
Si bien plus tard, sous le régime de Vichy apparaissait la devise "travail, famille, patrie", faut il en déduire qu'à cette époque le travail était (déjà) considéré presque unanimement comme une valeur de droite ?

J'y vois plutôt la double influence des socialistes vichystes et des moralistes pour qui le travail étouffe l'oisiveté et le déclin physique, intellectuel, matériel, spirituel et moral de la nation.

Les deux raisonnaient d'ailleurs en ceci que c'était bien par leur travail et leur production que les Allemands venaient de dominer matériellement et militairement la France.
persephone66 a écrit :
Ou était-ce surtout pour ce régime réactionnaire une façon de se valoriser aux yeux des conservateurs en suggérant fortement son opposition avec les valeurs prêtées par ces derniers à la gauche, la droite se plaisant à considérer les congés payés et la réduction de temps de travail comme la preuve de la paresse des travailleurs et feignant de voir en eux des "assistés" ?

Le dénigrement des assistés parasites, qui va des grosses fortunes rentières aux handicapés, aux RMistes et aux voleurs, n'est ni de gauche ni de droite. Je dirais qu'il croît en s'approchant des extrêmes du spectre politique (je le développerai pour l'extrême gauche dans ma réponse suivante).
Alain.g a écrit :
Le communisme russe magnifie le travail dans la propagande, les affiches, le stakhanovisme qui récompense les ouvriers les plus performants. En France on a le "retroussons nos manches" de Thorez en 1945.
Le socialisme semble plus dubitatif puisqu'il préconise depuis le 19è siècle la réduction de la durée du travail, réduction qui culmine avec le ministère du temps libre, les 40 heures de Blum, les 39 et plus tard les 35 heures. Sans compter la retraite à 60 ans. La flamme est entretenue par les projets de semaine de 25 heures à terme.

Les communistes héritiers des bolcheviques (tous les partis pro-soviétiques) ont utilisé un double discours.

Sous les régimes prosoviétiques, la propagande encensait le travail (la production) et l'oppression visait tous ceux qui l'entravaient, ouvriers et paysans revendicatifs, syndicalistes et grévistes compris :
Citer :
« La meilleure place pour un gréviste, ce moustique jaune et nuisible, pouvait-on lire dans la Pravda du 12 février 1920, c’est le camp de concentration ! »

1997, Le livre noir du communisme

Par contre-coup, le travail productif constituant une valeur dans les régimes prosoviétiques, leur propagande visait délibérément à le saper et à le déconsidérer dans les systèmes ennemis.

Les partis communistes prosoviétiques et syndicats associés, tels le couple PCF-CGT depuis les années 1930 en France, encourageaient ainsi tout ce qui détournait du travail : réductions du temps de travail, exigences d'aménagements matériels annexes (cotisations patronales, CE, espaces et temps de repos...), démoralisation et inquiétudes (en agitant des spectres tels que chômage, déstructurations, pénuries...), grèves, piquets de grève, sabotages, etc., tout ceci étant vigoureusement réprimé dans les régimes communistes.


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Message Publié : 01 Nov 2011 10:00 
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Georges Duby
Georges Duby
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Inscription : 27 Juil 2007 15:02
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Ce qui compte ce n'est pas de savoir si le travail est une valeur en soi, il ne l'est pas, c'est un moyen, ce qui compte c'est sa finalité dans le jugement émis à son sujet.
Démonstration: le PC russe magnifiait le travail ... pour le régime soviétique, mais faisait honte aux "faillots" du capitalisme et cherchait à affaiblir ses tenants. Quand le PC est associé au pouvoir, il prône aux ouvriers " retroussons nos manches" après guerre. Pendant la guerre, saboter le travail est une consigne de la Résistance.
Dans le monde d'après mai 68, travailler pour le patron est mal vu, mais travailler dans une association caritative correspond à un idéal.
Le travail n'est donc ni de droite ni de gauche, c'est sa finalité qui lui donne sa valeur.

_________________
Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 01 Nov 2011 10:39 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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La finalité du travail tout comme la droite et la gauche sont des thèmes qui varient sans cesse. Comment apporter une conclusion définitive à une question pareille ?


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Message Publié : 01 Nov 2011 10:49 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 04 Juin 2006 12:47
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Localisation : Centre
Les marxistes originels ne semblent pas avoir été unanimement des adorateurs du travail. Voici ce qu'écrit Paul Lafargue dans son livre "Le droit à la paresse".
Lafargue était un ami et disciple d'Engels et de Marx, dont il épousa la fille Laura,communard, membre du bureau de la Ière Internationale, fondateur d'une section marxiste de la Ière Internationale en Espagne, député socialiste de Lille, etc.

"Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l'amour du travail, la passion moribonde du travail, poussée jusqu'à l'épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture. Au lieu de réagir contre cette aberration mentale, les prêtres, les économistes, les moralistes, ont sacro-sanctifié le travail. Hommes aveugles et bornés, ils ont voulu être plus sages que leur Dieu; hommes faibles et méprisables, ils ont voulu réhabiliter ce que leur Dieu avait maudit. Moi, qui ne professe d'être chrétien, économe et moral, j'en appelle de leur jugement à celui de leur Dieu; des prédications de leur morale religieuse, économique, libre penseuse, aux épouvantables conséquences du travail dans la société capitaliste.
Dans la société capitaliste, le travail est la cause de toute dégénérescence intellectuelle, de toute déformation organique. Comparez le pur-sang des écuries de Rothschild, servi par une valetaille de bimanes, à la lourde brute des fermes normandes, qui laboure la terre, chariote le fumier, engrange la moisson. Regardez le noble sauvage que les missionnaires du commerce et les commerçants de la religion n'ont pas encore corrompu avec le christianisme, la syphilis et le dogme du travail, et regardez ensuite nos misérables servants de machines [3].
Quand, dans notre Europe civilisée, on veut retrouver une trace de beauté native de l'homme, il faut l'aller chercher chez les nations où les préjugés économiques n'ont pas encore déraciné la haine du travail.3

Pour lui, le culte du travail est à peu près une morale d'esclave , au sens nietzschéen: une idéologie inventée par les capitalistes et essentiellement destinée aux classes travailleuses, pour qu'elles travaillent davantage, au mépris de leurs propres intérêts.


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Message Publié : 16 Nov 2011 22:19 
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Hérodote
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Historiquement, la gauche s'est constitué et construit sur la critique sociale tandis que la droite s'est crée sur des valeurs. Donc cette question du travail n'a pas lieu d'être puisque la gauche idéologiquement ne s'articule pas sur des valeurs mais plutot sur un travail réthorique et pratique de critiques constructives.


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Message Publié : 16 Nov 2011 22:51 
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st germain a écrit :
Historiquement, la gauche s'est constitué et construit sur la critique sociale tandis que la droite s'est crée sur des valeurs. Donc cette question du travail n'a pas lieu d'être puisque la gauche idéologiquement ne s'articule pas sur des valeurs mais plutot sur un travail réthorique et pratique de critiques constructives.

ça c'est une opinion politique, pas une analyse. La gauche aussi s'est créée sur des valeurs.
C'est mon opinion. :mrgreen:

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Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


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Message Publié : 16 Nov 2011 23:41 
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Hérodote
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Inscription : 04 Oct 2011 22:07
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Ce n'est pas du tout une analyse subjective mais un fait historique découlant d'un processus de construction d'une idéologie. La valeur est un mot lié à une notion de vertu prenant ses racines dans la féodalité médiévale. Boulainvilliers, dans son essai sur la noblesse en france utilise le mot valeur afin de donner à l'aristocratie nobiliaire sa légitimité par rapport à ses vertus et son sang, notion qui sera reprise au XIXeme par les légitimistes et Chateaubriand.
Le mot valeur n'est pas employé par la gauche et celle-ci depuis les saint simoniens prend le contre pied de ces valeurs en en forgeant une critique progressiste. Proudhon est assez explicite sur ce sujet ainsi que Fourier.
L'historien René Rémond en fait référence dans son livre "l'histoire des droites"


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Message Publié : 17 Nov 2011 9:35 
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Je comprends. Tout dépend en fait du sens que l'on donne au mot "valeur."

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Message Publié : 19 Nov 2011 10:48 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 08 Nov 2010 17:01
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Localisation : sur le cardo d'une cité de la Gaulle romaine
Il a été fait la distinction entre "capital travail" et "capital financier".
La réponse se situe peut-être là.

_________________
Je n'ai pas cru que tes édits pussent l'emporter sur les lois non écrites et immuables des dieux. Sophocle


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Message Publié : 20 Nov 2011 12:02 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 22 Sep 2005 18:53
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Bonjour

Alain.g a écrit :
Démonstration: le PC russe magnifiait le travail ... pour le régime soviétique, mais faisait honte aux "faillots" du capitalisme et cherchait à affaiblir ses tenants. Quand le PC est associé au pouvoir, il prône aux ouvriers " retroussons nos manches" après guerre.


Sur ce sujet, voir le film d'Andrzej Wajda -> l'homme de marbre (l'histoire d'un maçon dont on fait un héros de propagande)


Sir Peter a écrit :
...on y respecte le travail,il a même sa fête le 1er mai (mais on ne fait pas quand même le double d'heures ce jour l& lol lol )


Le 1er Mai c'est la "Fêtes des Travailleurs" pas la "Fête du Travail". c'est pas la même chose !!!!!

_________________
Hugues de Hador.


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Message Publié : 11 Jan 2012 16:22 
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Thucydide
Thucydide

Inscription : 09 Sep 2011 21:01
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Bonjour, je trouve vos contributions très intéressantes.
Je pense avoir trouvé un petit élément de réponse dans la distinction que fait Simone Weil dans ses Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale , elle y écrit notamment :
"Si les analyses précédentes sont correctes, la civilisation la plus pleinement humaine serait celle qui aurait le travail manuel pour centre, celle où le travail manuel constituerait la suprême valeur. Il ne s'agit de rien de pareil à la religion de la production qui régnait en Amérique pendant la période de prospérité, qui règne en Russie depuis le plan quinquennal ; car cette religion a pour objet véritable les produits du travail et non le travailleur, les choses et non l'homme. Ce n'est pas par rapport avec ce qu'il produit que le travail manuel doit devenir la valeur la plus haute, mais par son rapport avec l'homme qui l'exécute ; il ne doit pas être l'objet d'honneur ou de récompenses, mais constituer pour chaque être humain ce dont il a besoin le plus essentiellement pour que sa vie prenne par elle-même un sens et une valeur à ses propres yeux".
"Quant au mouvement ouvrier, toutes les fois qu'il a su échapper à la démagogie, c'est sur la dignité du travail qu'il a fondé les revendications du travailleur".

Évidemment, il s'agit plus d'une opinion que d'une analyse historique mais même si mes connaissances sont bien trop limitées pour me permettre de savoir si cette vision-là était assez représentative ou pas chez les gens de même sensibilité politique que Simone Weil au moment où elle écrivait cela (en 1934 je crois), cela me paraît assez intéressant.

En lisant quelques autres auteurs "politiques" si j'ose dire tels que Bakounine ou Kropotkine j'ai l'impression que s'ils insistent assez fortement sur l'importance qu'y tiendrait le travail (surtout chez le premier), lorsqu'ils décrivent la société telle qu'ils la voudraient, c'est entre autres raisons, surtout parce qu'ils font très clairement la différence entre ce qu'ils considèrent purement et simplement comme un esclavage économique et ce qui serait le "vrai" travail.

Par exemple, dans son Catéchisme révolutionnaire, après avoir prôné plus haut l'abolition de l'héritage et du salariat, Bakounine écrit :
"Le travail étant le seul producteur de richesse, chacun est libre sans doute soit de mourir de faim, soit d’aller vivre dans les déserts ou dans les forêts parmi les bêtes sauvages, mais quiconque veut vivre au milieu de la société doit gagner sa vie par son propre travail, au risque d’être considéré comme un parasite, comme un exploiteur du bien, c’est-à-dire du travail d’autrui, comme un voleur. Le travail est la base fondamentale de la dignité et du droit humains. Car c’est uniquement par le travail libre et intelligent que l’homme, devenant créateur à son tour et conquérant, sur le monde extérieur et sur sa propre bestialité, son humanité et son droit, crée le monde civilisé. Le déshonneur qui, dans le monde antique, aussi bien que dans la société féodale, fut attaché à l’idée du travail, et qui en grande partie reste encore attaché aujourd’hui, malgré toutes les phrases que nous entendons répéter chaque jour sur sa dignité, ce mépris stupide du travail a deux sources : la première, c’est une conviction si caractéristique des anciens et qui même aujourd’hui compte encore tant de partisans secrets ; que pour donner à une portion quelconque de l’humaine société les moyens de s’humaniser par la science, par les arts, par la connaissance et pat l’exercice du droit, il faut qu’une autre portion, naturellement plus nombreuse, se voue au travail comme esclave."
http://fr.wikisource.org/wiki/Cat%C3%A9 ... utionnaire

Chez les nihilistes russes des années 1860 et les populistes russes des années 1870, il y avait apparemment aussi une forte valorisation du travail qui allait de pair avec une sensibilité très éloignée de l'idéologie capitaliste.


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Message Publié : 13 Jan 2012 14:48 
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Plutarque
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Inscription : 25 Avr 2011 17:49
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Geopolis a écrit :
Les partis communistes prosoviétiques et syndicats associés, tels le couple PCF-CGT depuis les années 1930 en France, encourageaient ainsi tout ce qui détournait du travail : réductions du temps de travail, exigences d'aménagements matériels annexes (cotisations patronales, CE, espaces et temps de repos...), démoralisation et inquiétudes (en agitant des spectres tels que chômage, déstructurations, pénuries...), grèves, piquets de grève, sabotages, etc., tout ceci étant vigoureusement réprimé dans les régimes communistes.

Hum.... vous oubliez le stakhanovisme et le 'retroussons nos manches' de Thorez ainsi que son célèbre 'il faut savoir terminer une grève'... Le culte du travail et de l'outil de travail me semble avoir toujours été très fort dans le communisme.


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Message Publié : 19 Jan 2012 1:53 
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Thucydide
Thucydide

Inscription : 09 Sep 2011 21:01
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J'ai trouvé un petit texte qui me paraît confirmer ce qu'il me semblait (sur la distinction esclavage capitaliste/"vrai" travail) sur Google Livres, au cas où cela intéresserait quelqu'un, voici le lien :
http://books.google.fr/books?id=0YmrihO ... e.&f=false

Il y est dit notamment :
"Marx va opposer le "vrai travail", essence de l'homme, lieu de créativité, à la réalité du travail tel qu'il se développe dans la société capitaliste de l'époque et qui est un travail aliéné. Ainsi, reprenant Hegel, pour Marx l'homme ne peut exister qu'en travaillant, c'est à dire, qu'en substituant ses propres oeuvres à la place du donné naturel. Autrement dit pour lui, le "vrai travail n'est pas le travail physique, celui qui s'accomplit dans effort et sous la contrainte. (...). Le travail, le vrai travail pourrait-on dire, n'est pas lié au besoin, il est une activité consciente, visant consciemment à faire du monde naturel un monde humain".

Car pour Marx, le travail est une activité fondamentalement créatrice, lieu d'expression de l'individualité et de reconnaissance des êtres humains entre eux."



Je rajoute aussi ces textes de jeunesse de Marx :
Marx

Le travail pour l'échange:

« Lorsque je produis plus qu'il ne me faut immédiatement, le surplus de ce que je produis est calculé avec raffinement eu égard à ton besoin. C'est seulement en apparence que je produis ce surplus. A la vérité, je produis un autre objet, l'objet de ta production que je voudrais échanger contre ce surplus, un échange que j'ai déjà accompli dans mon esprit. Le lien social où je me trouve par rapport à toi, mon travail pour satisfaire ton besoin, n'est donc qu'une apparence et notre intégration mutuelle n'est, elle aussi, qu'apparence: leur base, c'est le pillage réciproque. L'intention de voler et de tromper est nécessairement bien dissimulée; notre échange étant intéressé aussi bien de mon côté que du tien - chaque égoïsme voulant dépasser l'autre - nous cherchons à nous voler réciproquement. Il est vrai que le degré de pouvoir que je reconnais à mon objet sur le tien réclame ton approbation pour devenir un pouvoir réel. Mais notre approbation réciproque du pouvoir respectif de nos objets est un combat et pour l'emporter, il faut avait plus d'énergie, de force, d'intelligence ou d'habileté. Si la force physique suffit je te vole directement. Si la force physique n'est pas de mise, nous cherchons à nous duper réciproquement et le plus habile trompe l'autre. Peu importe, du point de vue du système dans son ensemble, lequel des deux a eu l'avantage. La tromperie idéale, escomptée, s'opère des deux côtés, autrement dit chacun a trompé l'autre dans son propre jugement.

(...) Le seul langage compréhensible que nous puissions parler l'un à l'autre est celui de nos objets dans leurs rapports mutuels. Nous serions incapables de comprendre un langage humain, il resterait sans effet. Il serait compris et ressenti d'un côté comme prière et imploration, et donc comme une humiliation ; exprimé honteusement, avec un sentiment de mépris, il serait reçu par l'autre côté comme une impudence ou une folie et repoussé comme telle ; nous sommes à ce point étrangers à la nature humaine qu'un langage direct de cette nature nous apparaît comme une violation de la dignité humaine : au contraire le langage aliéné des valeurs matérielles nous paraît le seul digne de l'homme, la dignité justifiée, confiante en soi et consciente de soi. A la vérité à tes yeux, ton produit est un instrument, un moyen pour t'emparer de mon produit, et donc pour satisfaire ton besoin. Mais à mes yeux il est le but de notre échange. Tu n'es pour moi que le moyen et l'instrument pour produire cet objet, qui est un but pour moi, de même que inversement, tu te trouves dans ce même rapport à mon objet. Mais
1) chacun de nous agit comme sous le regard de l'autre ; tu t'es réellement changé en moyen, en instrument, en producteur de ton propre objet afin de t'emparer du mien ;
2) ton propre objet n'est pour toi que l'enveloppe concrète, la forme cachée de mon objet, car sa production signifie, veut exprimer l'acquisition de mon objet. Tu es devenu, en fait, ton propre moyen; l'instrument de ton objet dont ton désir est l'esclave, et tu as accepté de travailler en esclave afin que l'objet ne soit plus jamais une aumône à ton désir. Si à l'origine du développement, cette dépendance réciproque face à l'objet apparaît pour nous en fait comme le système du maître et de l'esclave, ce n'est là que l'expression sincère et brutale de nos rapports essentiels. La valeur que chacun de nous possède aux yeux de l'autre est la valeur de nos objets respectifs. Par conséquent, l'homme lui-même est pour chacun de nous sans valeur.»

Manuscrits de 44, oeuvres, La Pléiade, Economie, II, (1968), p. 31-33.


Et voici comment il imagine le travail pour le don réciproque :

« Supposons que nous produisions comme des êtres humains, chacun de nous s'affirmerait doublement dans sa production, soi-même et l'autre.
1) Dans ma production, je réaliserais mon individualité, ma particularité, j'éprouverais, en travaillant, la jouissance d'une manifestation individuelle de ma vie, et, dans la contemplation de l'objet, j'aurais la joie individuelle de reconnaître ma personnalité comme une puissance réelle, concrètement saisissable et échappant à tout doute.
2) Dans ta jouissance ou ton emploi de mon produit, j'aurais la joie spirituelle immédiate de satisfaire par mon travail un besoin humain, de réaliser la nature humaine et de fournir au besoin d'un autre l'objet de sa nécessité.
3) J'aurais conscience de servir de médiateur entre toi et le genre humain, d'être reconnu et ressenti par toi comme un complément à ton propre être et comme une partie nécessaire de toi-même, d'être accepté dans ton esprit comme dans ton amour.
4) J'aurais dans mes manifestations individuelles, la joie de créer la manifestation de ta vie, c'est-à-dire de réaliser et d'affirmer dans mon activité individuelle ma vraie nature, ma sociabilité humaine (Gemeinwesen). Nos productions seraient autant de miroirs où nos êtres rayonneraient l'un vers l'autre. Dans cette réciprocité, ce qui serait fait de mon côté le serait aussi du tien.» (Ibid.)




http://mireille.chabal.free.fr/marxreci.htm


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Message Publié : 19 Jan 2012 8:39 
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Plutarque
Plutarque

Inscription : 25 Avr 2011 17:49
Message(s) : 130
Cela dit il semblerait que Marx ne se soit jamais considéré comme appartenant à 'la gauche' qu'il critiquait au contraire vertement... Je n'ai pas de source sous la main, mais les bons connaisseurs devraient pouvoir trouver des citations...


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