Dupleix a écrit :
Je suis parfaitement d’accord avec Narduccio sur le fait que le vernis régionaliste et les « identités régionales » que l’on nous a servies ne sont que prétexte pour les gens en place pour s’opposer au changement. A l’exemple de la farce sur le thème « ils vont démembrer la Picardie » qui avait servi à torpiller le rapport Balladur.Bien sûr, il existe des identités régionales. Mais elles n’ont aucun lien (hormis, malheureusement, le nom) avec les entités purement administratives que sont ces « régions » qui n’existaient pas à l’époque de mes grands-parents. Par exemple, je ne vois pas pourquoi un Basque se sentirait plus ou moins d’appartenance à l’ancienne région Aquitaine ou à la nouvelle grande région.
J'ajouterais qu'il y a une nette confusion (entretenue par certains) entre "culture" et "administration". Il est tout à fait naturel d'éprouver un attachement à une culture régionale donnée. En revanche, penser que cette culture est d'une quelconque manière tributaire d'une organisation administrative donnée est plus qu'une erreur, une stupidité. Nombre de régions (dans son sens non administratif) existent, sont reconnues comme telles sans qu'elles n'aient, depuis des décennies voire des siècles, de correspondance administrative. Le Pays basque cité est un exemple ; son voisin le Béarn, un autre. Ainsi, s'accrocher à sa région (ou autre) administrative au motif de repères culturels est une aberration.
Dupleix a écrit :
La volonté de créer, par le nom, une identité aux nouvelles grandes régions est certes compréhensible de la part des élus qui ont envie de se sentir représentants d’une « vraie » région ; mais d’une part l’intérêt me semble faible, et puis on touche quand même le fond quand on voit ressurgir l’Austrasie ou la Septimanie.
Je classerais ces deux exemples dans le ridicule plutôt. A mes yeux, le fond est plutôt atteint avec "Hauts-de-France", où "hauts" est une référence explicite à la carte de France (le haut de la carte) alors qu'en géographie, le terme est associé à des reliefs ou aux cours d'eau. Au contraire même, je me souviens des luttes de mes professeurs pour bannir le terme "haut" (comme "à droite" ou "à gauche") dès lors qu'on parle d'une carte, au profit des points cardinaux. J'imagine, dans les années à venir, la facilité avec laquelle les enseignants vont pouvoir expliquer à leurs élèves que "haut, bas, droite, gauche" ne sont pas les vocables à employer alors même que l'un d'eux a été validé administrativement...
Dupleix a écrit :
Je rejoins aussi Thierry M sur notre propension à ajouter des strates plutôt qu’à remplacer. C’est pourquoi, sans être convaincu que la réforme des régions qui se met en place est la meilleure possible, je lui reconnais au moins la vertu majeure de remplacer plutôt que de contourner.
Je dirais plutôt la moins mauvaise des solutions plutôt que la meilleure possible ; je rappellerai qu'au tout début, il était question de supprimer les départements. Mais, comme d'habitude, l'étape de la suppression a été impossible. Et puis, le "gain" de ces fusions sera, en tout cas à court et moyen terme, très très relatif : strapontins démultipliés pour ne vexer personne, alignement inévitable des salaires sur le mieux-disant (mais qui va donc conduire à des hausses fiscales dans certaines ex-régions), gaspillage de deniers publics avec tous ces hôtels régionaux dont certains n'ont même pas 5 ans mais qui sont désormais inutiles, et j'en passe et des meilleures.
Dupleix a écrit :
A l’inverse, au niveau communal, l’attachement des Français (ou plutôt celui de leurs élus locaux ?) aux communes de 1789 a conduit l’Etat à promouvoir un système de regroupement de communes pour contourner la difficulté. C’était peut-être la seule manière de pouvoir faire quelque chose. Le problème, c’est que dans l’affaire on perd en représentativité des élus puisque ces structures de pouvoir sont élues par des élus. Avec tous les travers que cela suppose.
Je pense que beaucoup de Français demeurent attachés à leurs communes (et pas seulement les élus) ; ensuite, on peut discuter de la validité des raisons de cet attachement mais il me semble réel. La réforme que vous évoquez est cependant symptomatique de ce que j'évoquais : on a empilé une nouvelle couche sur l'existant, sans rien changer de cet existant. Tout le monde peut aujourd'hui en voir les conséquences, notamment par la fiscalité, la complexification des relations entre les usagers et les collectivités pour savoir qui fait quoi, etc. sans compter, en effet, la représentativité (un problème qui a cependant disparu depuis les élections de 2014 mais nous sommes hors-limites temporelles). J'avoue ne pas comprendre pourquoi, à l'époque, on ne s'est pas inspiré de la loi PLM de 1982 pour transposer le système des arrondissements aux communes constituant les EPCI.
PS : Toutefois, nous ne sommes pas sur le fil du rasoir entre ce forum-ci et le salon géopo ?