Pour introduire ce nouveau message, deux petites citations de Silver :
Citer :
J'ai développé l'idée que la présence administrative et commerciale de Rome ne suffisait pas à expliquer la différence linguistique qui s'est produite entre les deux rives de la Manche (les grands-bretons ont conservé leur langue, pas les gaulois). Pour la bonne raison qu'à mon sens, l'empreinte romaine a été la même en Bretagne et en Gaule.
Citer :
Vous avez répondu en substance que la différence provenait pour vous d'une moindre romanisation de la Bretagne. Par des liens qui vous ont excédé (mais ces liens sont bien sourcés par des études), je vous ai montré que rien ne justifiait l'idée d'une romanisation différente que vous avanciez entre les deux côtés de la Manche.
Je ne suis pas d'accord. Je ne nie pas la romanisation physique, matérielle, les routes, les monuments etc...
Mais la pénétration du latin, à coup sûr est bien moindre en Britannia qu'en Gaule..
Quand est-ce que la langue latine est arrivée en Gaule ?
Je vais pas refaire tout l'historique depuis Brennus (-IVe) si (je noterai juste que celui-ci n'a pas l'air incommodé par l'absence d'une langue commune, lors de ses négociations avec le Sénat romain. Et que le "
Vae victis" qu'on lui prête est certainement apocryphe). Mais quelques points devraient être abordé.
Aux Ve et IVe siècle avant JC
les gaulois servent de mercenaire (via l'oppidum de Glanum et Marseille) sur la plupart des champs de bataille de la méditerranée occidentale. Ce qui implique pour les élites une bonne connaissance du grec,
lingua franca de l'époque, et probablement des notion de latin, d'étrusque et de punique, selon leurs engagement. Ces connaissances linguistique sont susceptible d'avoir été transmises à leur héritiers. Des gaulois s'installent en contact avec la civilisation latine (et des helvètes sont mentionné comme habitant Rome, et donc parlant latin)
Au IIIe Les gaulois participent en tant que mercenaires aux guerres puniques. les Arvernes envoie lors de la seconde une ambassade au frère de Hannibal. A la suite de cette seconde guerre, des marchands et des militaires romains traverseront régulièrement le sud de la Gaule transalpine. Mentionnons également la délégation celte envoyé à Alexandre le Grand, capable de soutenir une conversation de haut vol avec le roi macédonien (c'est l'anecdote du ciel qui tombe sur la tête...).
Au second siècle avant JC, les Eduens ont forgés une alliance avec Rome. Ils sont
frères de sang. Ce titre de "
Frère de sang" n'est accordé, selon un auteur que j'ai encore une fois oublié (Goudineau ?), qu'aux Eduens et aux Troyens. Ceci implique, je pense, que, deux siècles avant la conquête, les Eduens connaissent suffisamment, et les récits homériques, et les mythes de fondations de Rome par un descendant d'Enée, pour les mêler à leur propre histoire nationale et utiliser le résultat dans un but diplomatique.
Un peu plus tard, cette alliance entraîne une guerre entre Arverne-Salyen-Allobroges et Romains. Le résultat de cette guerre est la fondation de la province de narbonnaise. Il y a dès ce moment des traces de la pénétration latine dans la gaule indépendante. Via les marchands, les traités diplomatiques, les "amis du sénats", etc. Le latin supplante le grec chez les gaulois de celtique. La gaule belgique reste en revanche relativement épargnée par cette "latinisation" sourde.
La Britannia, elle, n'a comme contact avec le monde méditerranéen sur cette même période, que les visites sans lendemain de Himilcon et de Pythéas; Ils ne parlent donc, ni grec, ni latin, ni punique, ni étrusque...peut-être germain, certainement gaulois de celtique et d'armorique. leur premier contact prolongé avec le latin intervient lors de la guerre des Gaules lorsque Jules César décide d'aller leur faire une petite visite...
En bref, au moment de la conquête romaine, en -52, les gaulois parlent déjà latin régulièrement (dans le cadre diplomatique et commercial) depuis près de 70 ans (au moins) et connaissent le latin depuis plusieurs siècle. La britannia au contraire voit son premier contact en -54 et est conquise (partiellement) en 43. Elle n'est exposée au latin que depuis presqu'un siècle et via le filtre gallo-romain. l'exposition à la culture méditerranéenne n'est pas vraiment la même dans les deux cas....
Rajoutons que La Bretagne est abandonnée par les romains en 407. La Gaule, elle, ne retrouve son indépendance (officiellement) qu'à la chute de l'empire romain d'occident en 476, à l'exception du royaume romain de Syagrius qui disparaît en 486.
Rajoutons encore que la Bretagne semble bien moins christianisé que la Gaule, qu'elle est conquise par des païens et qu'elle n'a été romanisée que jusqu'aux murs d'Hadrien et d'Antonin. La Gaule au contraire est "conquise" par des Ariens (donc chrétiens), qui ont en fait demandé l'autorisation à Rome pour s'installer là et sont eux-même partiellement romanisés (le père de Clovis est "dux bellorum" romain). Dans les fait, au quotidien, malgré la chute de l'empire romain, celui-ci perdure (ce qui n'est pas le cas en Bretagne).
Rajoutons encore que la Bretagne a été re-christianisée vers les Ve et VIe siècle par des religieux Irlandais dont la soumission à Rome reste discutable. En bref la christianisation de l'Angleterre me paraît potentiellement un vecteur de celtisation et non de Romanisation.