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Message Publié : 17 Sep 2021 22:10 
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Polybe
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Pouzet a écrit :
Ce que vous dites sur la fin de l'empire romain d'occident est très étonnant, il me semblait au contraire que l'état impérial avait vers sa fin écrasé d'impôts les plus riches d’où un déclin de l'évergétisme.
Ensuite le pouvoir politique à la fin de l'Empire n'appartenait certainement pas aux sénateurs ceux ci n'ayant quasiment plus aucun pouvoir. Non le pouvoir à l'époque appartenait aux militaires dont les coups d'état se succédaient.


J'ai précisé que je connaissais très mal cette période et que je me contentais de reprendre Scheidel. Dans les pages suivantes, il précise en effet comment le pouvoir du Sénat se rétrécit et devient plus local (durant le Ve siècle je suppose ?). Cette aristocratie qui avait accumulé d'immenses fortunes grâce à ses positions politiques s'en trouve chamboulée. Si, comme vous le dites, les plus riches ont été écrasé d'impôts dans cette période de crise (alors qu'ils étaient visiblement exemptés de certains d'entre eux précédemment), cela va plutôt dans le sens de la théorie du bouquin : seules les situations de crise violente sont en mesure d'inverser le mouvement normal d'inégalité.

Pouzet a écrit :
Enfin ce que vous dites sur l'état des squelettes lors de la chute de Rome est très intéressant, est ce que toutes les sources le corrobore ?


Non, je ne le pense pas. Scheidel est très prudent dans ce passage et parle d'indications qui "semblent aller dans ce sens" en précisant qu'elles "ne constituent pas une preuve suffisante".

Les notes de bas de page renvoient à plusieurs articles si vous souhaitez creuser :
- Nicola Koepke, The Biological Standard of Living in Europe from the Late Iron Age to the Little Ice Ag
https://www.oxfordhandbooks.com/view/10.1093/oxfordhb/9780199389292.001.0001/oxfordhb-9780199389292-e-34
- Richard H. Steckel, Heights and Human Welfare: Recent Developments and New Directions
https://www.nber.org/system/files/working_papers/w14536/w14536.pdf
- Monica Giannecchini, Stature in archeological samples from Central Italy: Methodological issues and diachronic changes
https://www.researchgate.net/publication/5845883_Stature_in_archeological_samples_from_Central_Italy_Methodological_issues_and_diachronic_changes
- Irene Barbiera, Population Dynamics in Italy in the Middle Ages: New Insights from Archaeological Findings
https://www.researchgate.net/publication/46537449_Population_Dynamics_in_Italy_in_the_Middle_Ages_New_Insights_from_Archaeological_Findings
- Carles Boix, Bones of Contention: The Political Economy of Height Inequality
http://piketty.pse.ens.fr/files/BoixRosenbluth2014.pdf

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Message Publié : 18 Sep 2021 11:52 
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Bequelune a écrit :
- Nous ne connaissons aucun outil (y compris la démocratie) qui ait permis de réduire de façon pacifique les inégalités et la tendance à l’aggravation de celles-ci. Même les mouvements sociaux ou les politiques gouvernementales de solidarité n’ont fonctionné que dans le cadre d’une guerre totale ou d’une révolution, qui toutes deux ont tué des millions de personnes. Et encore, cette efficacité est temporaires car, quelques décennies après, les inégalités reviennent très vite et très fort. Nous vivons, depuis les années 1980, ce moment de retour en puissance des inégalités après une baisse drastique de celles-ci pendant et dans l’immédiat après-guerre.
- La civilisation est un processus inégalitaire. Plus une société est civilisée, plus elle est inégalitaire. Le fonctionnement normal d’une société en temps de paix est d’aller vers une concentration toujours plus importante des ressources dans les mains de quelques uns. À l’inverse, le retour à plus d’égalité est une simplification de la complexité des sociétés ; dit plus simplement, que ce soit à cause d’une guerre totale, d’une pandémie ou de l’effondrement, la fin de l’inégalité ne peut venir que d’une brutale et violente décivilisation.
- Cet accroissement des inégalités est un facteur important de troubles. Si Scheidel se refuse à tout déterministe et ne veut pas affirmer qu’il existe des seuils intolérables d’inégalités qui conduiraient inévitablement à la catastrophe, on est bien obligé de voir que l’inégalité extrême est une source majeure de dysfonctionnements.


Vous devriez vous pencher sur le néolithique européen pour comprendre que la civilisation sert justement à limiter les inégalités. Depuis longtemps les préhistoriens et protohistoriens ont noté le cas particulier de la naissance de la civilisation en Europe. Il y a plus ou moins 2 thèses à ce sujet, et pour les 2, le rôle de l'organisation de la société dans la réduction des inégalités joue un rôle certain. Posons déjà le problème, dans diverses régions du monde, il y a un premier néolithique qui est la phase de l'installation des agriculteurs et des éleveurs sur toutes les terres disponibles. Le second néolithique correspond à la phase où la société se structure, où se développe un artisanat, où l'on va exploiter les métaux, ... Et petit à petit la société se structure, avec une répartition inégale des richesses. Une classe de chefs devient de plus en plus riche, le reste de la société étant nettement moins riche. Mais, souvent on note que les populations croissent. En fait, une partie des membres de la communauté échangent une vie aventureuse avec une vie sédentaire où on travaille beaucoup, mais où la vie est relativement plus facile que la vie libre du chasseur-cueilleur...

Ce schéma fonctionne un peu partout... Sauf en Europe. En Europe, on voit un cycle se mettre en place à un tas d'endroits. La société commence à se structurer, et puis tout se délite... La plus ancienne explication était que les européens ne seraient pas arrivés à mettre en place une culture permettant aux puissants de dominer la société. Si on prend le cas de l’Égypte Antique, le Pharaon est l'interlocuteur privilégié entre les hommes et les Dieux. Il est aussi garant de la Maat, qui est plus ou moins l'équilibre serein de la société, on pourrait dire la paix sociale qui fait que les choses se produisent comme il faut, dans l'ordre qu'il faut pour les siècles et les siècles Bref, tant que chaque année, les Dieux montrent leur satisfaction en reproduisant une bonne crue du Nil, qui permette de remplir les greniers et les ventres, c'est la preuve que le Pharaon remplit bien son rôle d'intermédiaire et il justifie ainsi sa place au sommet de la hiérarchie de la société.

Donc, les sociétés du second néolithique européen n'auraient pas su développer ce récit commun pour justifier la main-mise d'une caste noble et la marche vers la civilisation ... Mais, il y a une seconde théorie, celle des espaces contraints. En fait, si on y regarde de plus près, les sociétés du second néolithique qui ont créé des civilisations sont des sociétés où une zone très fertile est englobée dans une zone où la vie est très difficile. Le paysan égyptien qui ne se satisferait pas de son sort ne peux pas fuir. A l'ouest, il y a un désert. A l'Est, il y a un désert. Au sud, il y a une montagne, désertique. Au nord, il y a la mer. Pas de fuites possible. En Europe, avec ces grandes plaines, il y a toujours pas loin un espace à conquérir et à cultiver. Bref, quand la société devient trop contraignante, il suffit de prendre ses cliques et ses claques et d'aller quelques dizaines de kilomètres plus à l'ouest ou plus au nord. Il faudra tout recommencer à zéro, mais on a de nouveau des chances d'avoir une place avantageuse dans la nouvelle société qui va se créer.

Bref, dans les 2 cas, pour perdurer, les sociétés doivent trouver un équilibre avec une redistribution des richesses. D'ailleurs, il en existe aussi dans les Empire antiques. Car il y a toujours des possibilités d'évoluer dans la société, soit en devenant soldat, soit en devenant un artisan, un commerçant, ... D'autant que les archéologues découvrent que les sociétés de chasseurs-cueilleurs n'étaient pas toujours ces mondes égalitaires, tel qu'on se les représente dans l'imaginaire.

Bref, ces théories qui veulent que le monde devienne inégalitaire en se socialisant sont bâties sur du sable. Le sable de nos rêves qui nous présentent les sociétés primitives comme des sociétés égalitaires. ce qu'elles ne sont pas ! Bâties sur des rêves, elles ne peuvent pas raconter la réalité, et elles ne peuvent pas la prendre en compte. Pour qu'une société perdure, il faut que les classes sociales les plus pauvres voient un avenir possible plus rose que le présent ou qu'un passé révolu. Elles aspirent à la pays sociale, elles aspirent à un avenir sans famines, elles aspirent à un avenir où avec ce qu'elles mettront de coté, elles pourront évoluer vers mieux. Si on ne prend pas cela en compte, on n'arrive pas à comprendre comment des sociétés prétendues coercitives aient pu se maintenir durant des périodes aussi longues. Un peuple d'esclave finit par se révolter. Et plus sont avenir lui parait sombre, et plus il sera amené à se révolter. Les guerres sociales et les révoltes d'esclaves comme celle de Spartacus en sont la preuve en ce qui concerne la Rome Antique. Quand les injustices sont trop criantes, les gens se révoltent. Dans le cas des esclaves, c'était encore pire : qu'avaient-ils à perdre puisque même leurs vies ne leurs appartenaient plus ?

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Message Publié : 18 Sep 2021 13:55 
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Polybe
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Narduccio a écrit :
Vous devriez vous pencher sur le néolithique européen pour comprendre que la civilisation sert justement à limiter les inégalités. Depuis longtemps les préhistoriens et protohistoriens ont noté le cas particulier de la naissance de la civilisation en Europe. Il y a plus ou moins 2 thèses à ce sujet, et pour les 2, le rôle de l'organisation de la société dans la réduction des inégalités joue un rôle certain. (…)


Encore une fois, ici je ne donnais mon avis personnel mais j’essayais de rendre compte des thèses du livre de W. Scheidel. Évidemment, ce livre est trop dense et épais pour en faire un résumé complet sur un post de ce forum ; aussi, j’ai privilégié de mettre en avant des « idées inconfortables » (l’expression est de L. Chauvel) qui viennent à la lecture.

Merci pour votre résumé de l’état de la recherche, il est très clair. Je connaissais déjà - au moins pour la partie européenne - ces hypothèses qui pointent l’importance de la géographie. Et je sais bien que l’égalitarisme d’une société n’est pas moins « sociale », que l'illégalitarisme, et des gens comme Pierre Clastres ou James Scott théorisent bien ce qu’il faut d’inventivité sociale pour garder à distance pouvoir et inégalités. J’ai aussi lu chez Alain Testart que l’important, quand on parle d’inégalité, est moins dans une opposition chasseurs-cueilleurs / agriculteurs, que dans l’opposition collecteurs / stockeurs. Les peuples sans agriculture qui stockent à grande échelle des réserves alimentaires ont des structures inégalitaires comparables aux agriculteurs céréaliers.

Pour revenir à Scheidel, lui non plus ne parle pas des sociétés du paléolithique et du mésolithique comme étant naturellement égalitaires. Et s’il constate que l’arrivée du néolithique coïncide avec une augmentation des preuves d’inégalités, il note que « la domestication des plantes et des animaux n’était pas un préalable indispensable » à celles-ci (p. 60), et qu’on a des exemples bien documentés de sociétés non-agricoles pratiquant une distribution des richesses très inégalitaires.

Cela dit, il faut maintenant prendre en compte un autre facteur. Pour que le niveau d’inégalités d’une société donnée augmente (mesurée par le coefficient de Gini), il faut que celle-ci soit capable d’extraire une quantité de richesses supérieure au minimum vital. Un coefficient de Gini égal à 0 suppose une égalité radicale entre les membres de la société ; on peut l’imaginer (théoriquement) pour un groupe où ses membres dégagent péniblement de quoi subvenir à leurs besoins élémentaires. Dès que ce groupe ait capable de dégager un surplus, il faut voir comment est réparti ce surplus. Scheidel note que plus ce surplus de richesse est importante, plus le niveau d’inégalités l’est aussi.

Donc, pour reprendre votre expression, le monde ne devient pas inégalitaire en se socialisant mais la croissance des sociétés sédentaires-stockeuses, parce qu'elles permettent de dégager un surplus de richesse toujours plus important, coïncide avec une augmentation du niveau mesuré des inégalités. Cela ne veut pas dire que cette croissance ne bénéficie qu'aux plus riches de cette société (comme vous le dites, aucune élite n'est capable de contrôler une population astreinte au minimum vital) ; simplement, la croissance bénéficie davantage aux plus riches qu'aux autres, et à long terme les inégalités s'accroissent logiquement.

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Message Publié : 18 Sep 2021 18:14 
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Grégoire de Tours
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Débat très intéressant. Je reste un peu interrogatif sur les sources utilisables avant, mettons, le XVIème siècle, pour servir de base aux raisonnements. Ça a dû être un travail de titan.

Je reprends à mon compte certaines remarques ci-dessus. Sans vouloir du tout faire de procès d’intention à l’auteur, le discours sur « les inégalités » (surtout si il prend une tournure politique, ce qui est assez inévitable) butte en général sur 2 écueils mentionnés plus haut :
- Les inégalités de revenus ou de patrimoine (et leurs évolutions) sont indissociables du niveau de vie moyen (et de son évolution), comme l’a bien illustré supertomate. Dans les sociétés modernes, l’augmentation des inégalité semble difficilement supportable même lorsque le niveau de vie augmente. Mais cela n’a aucune raison de valoir également pour des périodes plus anciennes où davantage de gens n’avaient pas le minimum vital. Dès lors, même si l’objet de l’étude est « les inégalités » (permettant à l’auteur d’écarter l’évolution du niveau de vie moyen), cela ne suffit pas si l’on cherche à parler de leur impact sur les sociétés.
- En se focalisant sur « les X % les plus riches » (une expression curieuse, à la fois très floue et très à la mode depuis une dizaine d’années), on fait l’impasse sur la notion de mobilité sociale. Cette formule tend à laisser croire que ces X %, avatar des « 200 familles », sont inamovibles de toute éternité. Or il existe des indicateurs de la mobilité sociale (par exemple nombre moyen de générations pour qu’une personne issue des 10 % les plus pauvres atteigne le revenu médian). Et là aussi l’espoir d’ascension sociale peut rendre supportables des inégalités qui ne le sont pas en son absence.


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Message Publié : 18 Sep 2021 21:59 
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Polybe
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Le titre original du livre est The Great Leveler. C’est peut-être plus fidèle au contenu du livre que le choix de l’éditeur français. S’il y a bien une tentative d’esquisser une histoire globale des inégalités sur le temps longs dans le premier chapitre, le gros de l’ouvrage s’occupe à détailler chacun des 4 Cavaliers égalisateurs de l’histoire : la guerre totale, la révolution, l’effondrement, l’épidémie. À chaque fois, il ne part pas chronologiquement mais va plutôt du cas le mieux documenté au moins documenté. Forcément, pour les sociétés prémodernes, l’Empire Romain ou la Chine sous la dynastie Tang ont laissé plus de documents exploitables que d’autres espaces-temps où le pouvoir était moins centralisé. C’est une des faiblesses du bouquin, que l’auteur reconnait : il est souvent obligé de travailler à partir d’hypothèses sur la répartition des richesses. Il semble partir du principe que si les données qu’il a — même lacunaires — vont dans le sens de l’ensemble, on peut travailler avec. Il a cependant l’honnêteté intellectuelle d’être bien plus prudent sur ce genre de passage quand à ses conclusions. En tout cas, il y a toute une partie dans l’introduction où il explique sa méthode, ses outils d’analyse, et les limites de celles-ci.

Du coup ça répond un peu aux questionnements de Dupleix sur les sources utilisées avant le XVIème siècle. Je dirais que la difficulté est à dater différemment selon les régions. En Europe, on a des données qui permettent de remonter jusqu’au Moyen-Âge (même si elles ne sont pas continues dans le temps ni de même qualité selon les villes & régions) : archives des impôts sur le patrimoine, archives des taxes locatives, tables sociales, enregistrement de la valeur des biens agricoles ou des biens pour la succession… Dans d’autres espaces-temps, l’auteur est obligé de s’appuyer sur les analyses d’archéologues (donc des données très indirectes comme la taille des corps ou la surface des maisons, par exemple).

Dupleix a écrit :
- Les inégalités de revenus ou de patrimoine (et leurs évolutions) sont indissociables du niveau de vie moyen (et de son évolution), comme l’a bien illustré supertomate.


Cela me semble moins important dans le projet de l'auteur d'étudier quels sont les phénomènes capables d'augmenter les inégalités, et ceux capables de contrer cette augmentation des inégalités.

Dupleix a écrit :
- Les inégalités de revenus ou de patrimoine (et leurs évolutions) sont indissociables du niveau de vie moyen (et de son évolution), Dans les sociétés modernes, l’augmentation des inégalité semble difficilement supportable même lorsque le niveau de vie augmente. Mais cela n’a aucune raison de valoir également pour des périodes plus anciennes où davantage de gens n’avaient pas le minimum vital.


C'est étonnant, j'aurais plutôt dit l'inverse. On s'accomode assez bien que certains possèdent énormément quand on vit soi-même dans un relatif confort. À l'inverse, il peut être insupportable de voir que certains ont à peine plus quand chez soi on peine à manger à sa faim.

Dupleix a écrit :
- En se focalisant sur « les X % les plus riches » (…)


C'est sans doute moi qui ait donné une impression incorrecte dans ma présentation, il ne se focalise pas que sur les plus riches. Très exactement, Scheidel combine principalement coefficient de Gini et parts de revenus et de patrimoine, souvent exprimés en déciles ou en pourcentage. C'est l'association des deux, complémentaire, qui est intéressante. J'ai relevé ce passage : "alors que le coefficient de Gini calcule le niveau général des inégalités, les parts de revenus ou de patrimoines donnent un aperçu utile de la forme de la répartition".

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Message Publié : 18 Sep 2021 22:55 
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Grégoire de Tours
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Très intéressant. Ces histoires transversales avec un angle novateur le sont toujours, et la méthode est élégante.
Il semble que l'auteur ait approfondi la question de l'importance de la chute de l'Empire Romain dans l'amélioration du niveau de vie européen dans son livre suivant Escape from Rome: the Failure of Empire and toe Road to prosperity (Réchappés de Rome: l'échec de l'Empire et la voie de la prospérité)(2019).

https://books.google.ch/books/about/Esc ... &q&f=false


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Message Publié : 19 Sep 2021 9:50 
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Pierre de L'Estoile
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Je suis allé sur AMAZON.COM pour voir des résumés du livre.
Ce que je ne comprends pas alors c'est pourquoi l'Empire romain d'orient (byzantin) était si riche....

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Le souvenir ne disparait pas, il s'endort seulement.
Epitaphe trouvée dans un cimetière des Alpes

La science de l'histoire est une digue qui s'oppose au torrent du temps.
Anne Comnène, princesse byzantine (1083-1148)

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Message Publié : 19 Sep 2021 14:34 
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Salluste
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Citer :
Pour que le niveau d’inégalités d’une société donnée augmente (mesurée par le coefficient de Gini)

Un indicateur n'est pas une vérité, un indicateur donne éventuellement une indication.

Mais, à force d'approximations (entre autres la solidité des données), il arrive fréquement qu'un indicateur n'indique plus rien, ou alors un mensonge.

Je serais bien plus interressé par une discussion sur les inégalités utilisant des mots comme "environ", "beaucoup", "la plupart", "assez riche", etc... que ce même sujet utilisant "coefficient de Gini", "courbe de Lorenz", "quantiles", ...

Dans un cas on est conscient des limites et on le montre, dans l'autre on fait preuve d'une fausse scientificité qui donne une illusion de vérité. C'est regretable.


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Message Publié : 19 Sep 2021 14:47 
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Grégoire de Tours
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Merci Bequelune pour ces précision, cela me donne envie de dévoucrir le livre...
Bequelune a écrit :
Dupleix a écrit :
- Les inégalités de revenus ou de patrimoine (et leurs évolutions) sont indissociables du niveau de vie moyen (et de son évolution), Dans les sociétés modernes, l’augmentation des inégalité semble difficilement supportable même lorsque le niveau de vie augmente. Mais cela n’a aucune raison de valoir également pour des périodes plus anciennes où davantage de gens n’avaient pas le minimum vital.


C'est étonnant, j'aurais plutôt dit l'inverse. On s'accomode assez bien que certains possèdent énormément quand on vit soi-même dans un relatif confort. À l'inverse, il peut être insupportable de voir que certains ont à peine plus quand chez soi on peine à manger à sa faim.

Tout ça se discute et je rappelle que je parlais d'augmentation des inégalités et du niveau de vie (pas de leur situation à un instant donné)... Par exemple, en France, globalement la population mange à sa faim et le niveau de vie a augmenté ces dernières décennies, pourtant la critique des inégalités (et de leur augmentation) ne s'est jamais aussi bien portée, que ce soit chez certains économistes ou chez les politiques... Il semble qu'on ne s’accommode finalement pas si bien que certains possèdent énormément.
Au contraire, j'émettais l'hypothèse que, lorsque le niveau de vie augmente pour des personnes qui n'ont pas le minimum, et que l'amélioration est donc beaucoup plus substantielle, l'augmentation des inégalités pourrait être moins ressentis... Mais ce n'est qu'une hypothèse.

En tout cas je crois comprendre que ce n'est pas le sujet du livre.


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Message Publié : 19 Sep 2021 16:23 
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J'aimerai bien savoir comment est calculé ce fameux coefficient de Gini, si je change les paramètres, j'obtiens un résultat forcément différent.

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Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)


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Message Publié : 19 Sep 2021 16:26 
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Une explication ici: https://educationfinance.ca/economie/co ... t-de-gini/


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Message Publié : 19 Sep 2021 21:20 
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Polybe
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supertomate a écrit :
Citer :
Je serais bien plus interressé par une discussion sur les inégalités utilisant des mots comme "environ", "beaucoup", "la plupart", "assez riche", etc... que ce même sujet utilisant "coefficient de Gini", "courbe de Lorenz", "quantiles", ...

Dans un cas on est conscient des limites et on le montre, dans l'autre on fait preuve d'une fausse scientificité qui donne une illusion de vérité. C'est regretable.


J'avoue ne pas bien comprendre où vous voulez en venir. Les chercheurs qui utilisent ces outils sont bien conscients de leurs limites. J'ai déjà écris dans ce fil que Scheidel indique dès l'introduction les limites de sa méthode et, dans le cours des chapitres, il précise également les données sur lesquels le calcul s'appuie et si elles permettent ou non des conclusions solides selon leur précision et leur fiabilité. Je ne vois pas d'opposition entre l'utilisation de mots comme "environ", "beaucoup" et l'étude via des outils comme la courbe de Lorenz.

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Message Publié : 20 Sep 2021 9:18 
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Jean-Marc Labat a écrit :
J'aimerai bien savoir comment est calculé ce fameux coefficient de Gini, si je change les paramètres, j'obtiens un résultat forcément différent.


Les paramètres sont codifiés, donc pour la période actuelle, les résultats sont consolidés. On pourrait débattre de la pertinence de certains choix, mais, entre spécialistes, le débat a déjà eu lieu.

Là où les choses sont plus complexes, c'est lorsqu'on essaye de calculer ce coefficient pour des périodes plus anciennes. Périodes où certains paramètres sont estimés de manière plus ou moins grossière. Parfois, ça tourne à l'estimation au doigt mouillé.

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Message Publié : 20 Sep 2021 17:38 
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Si l'auteur explique sa méthodologie, cela peut rester heuristique. Par exemple, explique-t-il la corrélation et éventuellement causalité entre la "taille des corps et les lésions osseuses et dentaires", l'amélioration des conditions de vie, et la diminution des inégalités. Louis XIV avait les dents aussi pourries que le dernier de ses valets d'écurie.


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Message Publié : 20 Sep 2021 19:34 
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Grégoire de Tours
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.1° Ça embrasse un horizon bien plus limité que celui de Scheidel, mais je me rappelle Jean Fourastié comparant l’échelle des salaires dans l’armée française au début du XIXème et à l’époque contemporaine : la réduction survenue était immense.
C’est lacunaire mais je me rappelle la différence entre la rétribution prévue pour Colomb (la seigneurie héréditaire sur toute terre conquise) et celle prévue pour ses marins (qui étaient quatre-vingt-dix : si on avait donné un grade militaire à Colomb il aurait été quoi ? Trois ou quatre galons ?) : là aussi l’écart était immense.
Qu’avec le développement économique se mettent en place de très grandes fortunes est une chose. Bill Gates est plus riche que ne l’était Néron. Que le coefficient de Gini augmente avec le développement, cela m’étonne beaucoup.

.2° Pour prendre le cas de l’Occident, c’est un fait que, disons depuis trois mille ans l’égalité civique ou statutaire a énormément progressé.
L’esclavage s’est beaucoup humanisé au cours de l’histoire romaine, finalement il a disparu, finalement le servage a disparu lui aussi, puis nous sommes devenus tous des égaux civiques.
Il serait étonnant qu’à cette égalité croissante des conditions ait correspondu une inégalité croissante des revenus et des fortunes.

.3° Je me rappelle ce texte de l’Égypte antique où se manifeste ce cri indigné : « Le pauvre accède à l’immortalité de l’âme ! ». Selon Scheidel ce pauvre - ou ses aïeux qui trimaient à construire le tombeau du pharaon – vivait dans une société économiquement plus égalitaire que celle de l’Occident contemporain. J’ai du mal à le croire…


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