Je vois que dans son "Léon Blum" (2006) Serge Berstein pense comme René Rémond : il affirme que, si une liste reçoit la majorité absolue des suffrages exprimés dans une circonscription, elle emporte tous les sièges, sinon ils sont attribués à la proportionnelle (p 198). De même pour les élections de 1924 il parle "de la prime à la majorité absolue et du système de répartition des restes à la plus forte moyenne'.
Je suis parvenu à trouver les résultats d’un bon nombre de circonscriptions.
http://images.expressdumidi.bibliothequ ... _11_19.pdf.
J’en extrais :
Savoie
Inscrits, 70.081 ;
suffrages exprimés, 50.467 ;
majorité absolue, 26.220 ;
quotient électoral, 10.091
. Liste républicaine indépendante : Delachenal, 20.133 ; Richard, 19.164 ; Thibiercz, 18.711 ; Sibuet 18.816 ; Léger, 19.012.
Total : 95.838 [en fait 95 836]. Moyenne : 19.167. Soit 13,34 % des exprimés.
. Liste républicaine des anciens combattants : Gotteland, 7.330 ; Monard, 7.074 ; Bocoacie, 6.471 ; Sarraz-Bourmet, 6.503 ; Bozon-Verduraz, 6.288.
Total : 33.666. Moyenne : 6.733. Soit 13,34 % des exprimés.
. Liste d'Union républicaine : Borrel, 18.732 ; Dussuel, 16.736 ; Falcoz, 16.606 ; Mariât, 16.675 ; Praigollet, 17.524.
Total : 86.275. Moyenne : 17.255.
. Liste du parti socialiste unifié : Bévillard, 5.751 ; Dumallard, 5.827 ; Favre, 5.179 ; Finas, 5.362 ; Thomas, 5.542.
Total : 27.641. Moyenne : 5.532
Elus au quotient : Delachenal, Borrel.
A la plus forte moyenne : Richard, Léger, Sibuet.
1° Il y avait cinq députés à élire.
Chaque liste contient cinq noms et est donc complète.
2° Je ne comprends pas pourquoi la majorité absolue ( - 1) multipliée par deux est supérieure au total des suffrages exprimés : 26 219 x 2 = 52 438. La différence est de 52 438 – 50 467 = 1971.
En Loire-Inférieure, le nombre de votants est aussi indiqué :
Inscrits, 87.365; votants, 57.711 ; suffrages exprimés, 55.691; majorité absolue, 27.801.
27 800 x 2 = 55 600. Donc, ici la majorité absolue (– 1) multipliée par deux est INFERIEURE au total des suffrages exprimés. Différence : 91 voix.
C’est à dormir debout…
3° 50 467 / 5 = 10 093,4. Le QE devrait donc être de 10 093. Ils annoncent 10 091. Bizarre…
4° Il est clair que chaque électeur ne votait pas pour un seul nom…
Faisons la somme des sommes des voix pour chaque liste.
RI : 95 838
RAC : 33 666
UR : 86 275
PSU : 27 641
TOTAL 243 420
Or, exprimés : 50 467.
243 420 / 50 467 = 4,823.
Donc, en moyenne, un électeur a voté pour 4,823 candidats. 4,823 / 5 = 0,96 = 96%.
Comment ? Je suppose qu’il fallait cocher chaque nom, et que certains électeurs cochaient seulement certains noms.
Exprimons les résultats en pourcentages.
RI : 95 838 / 243 420 = 39,37%
RAC : 33 666 / 243 420 = 13,83%
UR : 86 275 / 243 420 = 35,44%
PSU : 27 641 / 243 420 = 11 ,35%
TOTAL 100%
3° Pourquoi Delachenal (20 133) et Borrel (18 732) sont-ils élus au quotient ? Et pourquoi Richard (19 164) ne l’est-il pas ?
« Il est attribué à chaque liste autant de sièges que sa moyenne contient de fois quotient électoral. »
QE : 10 091 (ou 10 093 ?)
Moyenne liste RI : 19 167
Moyenne liste UR 17 255.
Les deux autres listes ont des moyennes inférieures au QE :
RAC : 6 733
PSU : 5 532
En exprimant cela en termes de moyenne : le QE étant de 20%, deux sièges ont été attribués au titre du QE : 1 siège à la liste qui a eu 39%, et 1 à celle qui a eu 35%. Il y a eu donc 60% de restes, attribués tous à la liste qui a eu 39%.
4° Les trois sièges restant sont bien tous attribués dans la liste ayant la plus forte moyenne. Et, dans cette liste, aux trois candidats ayant le plus de voix parmi ceux non déjà élus par QE.
« Il est attribué à chaque liste autant de sièges que sa moyenne contient de fois quotient électoral. Les sièges restants, s'il y a lieu, seront attribués à la plus forte moyenne. »
CONCLUSION (provisoire).
Apparemment :
1° Un électeur ne votait pas pour un nom d’une liste, ni nécessairement pour tous les noms d’une liste, mais pour au moins un nom d’une liste. Ici, les bulletins ont été remplis à 96%.
2° Dans le cas de listes complètes (cas le plus fréquent, j’imagine) :
On attribuait à chaque liste autant de sièges qu’elle comprenait de fois le QE.
Puis tous les sièges restant allaient à la liste ayant eu le plus de voix (et donc la plus forte moyenne).
3° Pour le moment, je continue donc de penser que Rémond et Berstein se trompent.
Qu’en est-il de wikipedia ? « Il a été demandé à l'électeur de voter pour un candidat membre d'une liste. Il y a ensuite trois moyens d'être élu. D'une part, les candidats ayant rassemblé une majorité absolue de suffrages exprimés sur leur nom sont élus. Les sièges non-pourvus ainsi ont ainsi été répartis à la représentation proportionnelle, au quotient, entre les différentes listes (le score d'une liste étant bien entendu égal à l'addition des voix recueillies individuellement par les candidats qui y figurent). Enfin les sièges restants ont été tous attribués à la liste ayant recueilli le plus de voix . »
C’est la première phrase qui est erronée. Les autres seraient exactes.
4° J’ai un petit problème avec le calcul de la majorité absolue.
Et un tout petit avec le calcul du QE.