Je n'ai pas réussi à reconfirmer cette anecdote. J'ai lu plusieurs choses concernant le rapport entre Liszt et le tsar mais impossible de retomber sur cette anecdote en dehors du forum. Pourriez-vous me citer vos sources? J'aimerai en savoir plus, car en effet le passage du classicisme au romantisme m'intéresse énormément.

Voici le paragraphe qui se trouve dans la biographie de Liszt d'Alan Walker, en 2 volumes chez Fayard, page 299 du volume I :

Au cours d'un récital à Saint Petersbourg, le Tsar Nicolas I, arrivé en retard, s'était mis à parler. Liszt s'arrête de jouer et demeure assis au clavier, tête baissée. Lorsque le Tsar s'enquit de la raison de ce grand silence, Liszt répond : "La musique elle-même doit se taire lorsque parle Nicolas" .../... Le tsar demanda plus tard à Liszt de donner un concert de bienfaisance pour les survivants de la bataille de la Moskowa. La suggestion manquant de tact, Liszt répondit : "Je dois mon éducation et ma célébrité à la France, il m'est impossible de faire cause commune avec ses adversaires". Quand le tsar apprit cela il déclara devant une dame de la cour "Je n'apprécie ni les opinions politiques ni les cheveux de cet homme (Liszt laissait abondamment pousser ses cheveux blonds, ce qui n'était pas coutume en Russie). L'ayant appris, Liszt répliqua : "J'ai laissé pousser mes cheveux à Paris et je ne les couperai qu'à Paris ; quant à mes opinions politiques, je n'en ai aucune et n'en aurai aucune jusqu'au jour où le tsar daignera mettre à ma disposition trois cent mille baïonnettes".

Toutefois, Sarah, je ne vois pas en quoi cette anecdote concerne le passage du classicisme au romantisme, Liszt étant un "pur" romantique.

Merci pour la citation. Et je me suis peut-être mal exprimé; l'anecdote avec le tsar n'illustre pas en soi le passage du classicisme au romantisme, mais plutôt la rupture que les musiciens romantiques (dont Liszt) ont pu faire avec les conceptions d'avant. Haydn n'aurait pas songé à élever la voix au Prince Eszterházy (je ne dis pas "il n'aurait pas osé", il n'aurait juste pas pensé, à cette époque, que le fait que ses spectateurs parlent au cours de ses concerts soit quelque chose de problématique). L'écoute musicale est quelque chose qui s'est développée progressivement, et en grande partie grâce aux romantiques...

Pour Sarah ; vous connaissez certainement La Musique Romantique d'Einstein, qui traite de la question du passage du style classique au style romantique dans la musique. Sinon, sur le développement de l'écoute du 18e siècle au 19e siècle, l'ouvrage de James H. Johnson (Listening in Paris: A Cultural History) fournit un cadre d'analyse très intéressant.
(http://www.ucpress.edu/books/pages/6387.php , il me semble que cela ait été traduit en français, mais je n'ai pas pu vérifier cette information)

Stendhal rapporte cependant que lors des représentations d'opéra, on bavardait à qui mieux mieux dans les loges où un des auditeurs faisait le guet pour signaler aux autres un passage intéressant ; on faisait alors silence pour reprendre de plus belle les conversations une fois achevé le passage intéressant!

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"Le doute est le premier pas vers la conviction" (al-Ghazali, mort en 1111).

Je me suis permis de créer un nouveau sujet.

Je me suis également mal exprimée. En effet, c'est bien se que j'ai retiré de cette anecdote.
Elle illustre bien le changement de mentalité des compositeurs qui sont de plus en plus considérés comme des génies créateurs digne de respect. L'individualité des styles prime. Le musique passe de l'artisanat à l'art.

Merci Lohengrin pour les références.

1) Ce n'est pas la mentalité des compositeurs qui a changé, mais celle de la société.
2) Ces compositeurs n'ont pas attendu l'époque romantique pour "être de plus en plus considérés comme des génies créateurs dignes de respect".
3) "L'individualité des styles" n'est pas du tout ce qui "prime" chez les romantiques : elle existait avant eux, exista après eux, concurremment avec des styles moins individualisés et beaucoup plus conventionnels.
4) La musique n'est pas "passée de l'artisanat à l'art" grâce aux romantiques ; avant eux et après eux, il y a de la musique plus ou moins bien écrite. L'oeuvre de Bach, tout à fait "artistique", n'en obéit pas moins aux impératifs de "l'artisanat". Même Lamartine reconnaissait que la création artistique comportait "1/10ème d'inspiration et 9/10ème de transpiration"...

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"Le doute est le premier pas vers la conviction" (al-Ghazali, mort en 1111).

Pas sûr ! Contrairement aux arts plastiques, la musique a été classée depuis bien plus longtemps comme art "libéral" ; dans l'antiquité, elle est associée à une muse, et dès le moyen-âge, elle est enseignée à l'instar de l'astronomie, des mathématiques et de l'arithmétique dans le quadrivium. Elle n'a pas, comme la peinture ou la sculpture, à se détacher progressivement d'un statut manuel et artisanal ; le musicien est dès le moyen-âge considéré comme un intellectuel, et conserve ce statut.

Le XIXe siècle et ses romantismes voit surtout l'émergence de la figure du génie en tant que personnage, créateur, dépositaire de "l'Idée", aux talents innés. Elle apparaît en même temps à peu près dans tous les types d'arts (cf. figure de Géricault ou de V. Hugo, par exemple), et est encore ancrée dans les esprits de nos jours. Cette conception tend à favoriser l'abord de l'art par la personnalité de l'artiste. On l'applique aussi à des artistes plus anciens (l'exemple-type, c'est bien sûr Michel-Ange, mais on on peut citer Bach aussi : sa première biographie est rédigée en 1802).

Du 18è, on peut dire pour la musique qu'il reconnait le grand compositeur mais pendant son moment de gloire et selon l'humeur du souverain ou du maître. Ainsi Mozart meurt seul, comme Vivaldi (à Vienne!), Bach meurt fâché avec sa municipalité de Leipzig, mais Gluck est honoré à sa mort comme Monteverdi et Haydn porté en triomphe à Vienne de son vivant (au début du 19è). La renommée ne dure qu'un temps: Bach est vite oublié.
A cette époque, il n'y a pas de droit d'auteur, on peut copier et imiter. Pire, les oeuvres ne sont pas conservées, un opéra est composé quelques jours avant sa représentation puis on le jette et il n'en reste que ce que le compositeur a classé. Des centaines d'opéras célèbres sont de nos jours introuvables et ce qu'on a est souvent une trame car l'orchestre faisait la finition d'un opéra, un autre compositeur l'arrangeait pour plaire au public du moment. L'oeuvre n' était pas sacrée.
Au 18è, les interprètes comptent plus que les compositeurs. Les castrats par exemple sont des dieux vivants. C'est toujours un peu ainsi à vrai dire. D'où la méprise de Mozart. C'est comme interprète qu'il étonne. la gloire européenne de Clémenti l'agace, il joue mécanicus dit Mozart.
Il y a donc bien un changement au 19è, sur le caractère de l'oeuvre notamment. Mais les compositeurs continuent à moins compter que les interprètes. Et la gloire comme la fortune ne vont qu'à ceux qui les recherchent avec entregent: voir Schubert le timide.

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.

Surtout, les interprètes commencent alors à ne plus se confondre avec les compositeurs, tandis que jusque-là la même personne cumulait le plus souvent les deux fonctions.
Bach n'a pratiquement interprété que du Bach, Mozart que du Mozart, etc.
Croyant (à tort...) y retrouver l'anecdote sur Liszt et le souverain bavard, j'ai feuilleté le savoureux ouvrage d'Oscar Comettant, Musique & Musiciens (Librairie Pagnerre, 1862) dont j'ai la chance de posséder un exemplaire de l'édition originale ; l'auteur y conte d'une plume alerte nombre d'anecdotes sur ses contemporains musiciens dont il démystifie les prétentions au génie...

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"Le doute est le premier pas vers la conviction" (al-Ghazali, mort en 1111).

Je crois que le texte suivant est la source de l'anecdote en question :

Liszt, on le sait, avait la repartie aussi heureuse que prompte, tranchante même, s'il en voyait la nécessité. Tout chevaleresque qu'il était, en dépit de ses manières courtoises, l'artiste chez lui l'emportait toujours sur l'homme du
monde, du moment qu'il croyait l'artiste atteint dans sa dignité. Un manque de respect, un signe d'inattention le bles-
saient profondément; aussi ne pouvait-il supporter que l'on parlât pendant qu'il jouait. Il nous raconta à ce sujet les
anecdotes suivantes :

Durant une soirée à la cour de Saint- Pétersbourg où il était très bien vu, il arriva que le czar Nicolas, qui n'aimait
guère la musique, se mit à causer avec une dame, et, peu friand de l'exécution de Liszt, parla très haut. Tout d'un coup,
Liszt s'arrêta net et quitta le piano. Le czar, intrigué, s'approche du maître et lui dit :

— Pourquoi avez-vous interrompu votre jeu?

— Quand l'empereur parle, on doit se taire, fut la réponse machiavélique de l'artiste froissé.

Janka WOHL. François Liszt : souvenirs d'un compatriote, Paris : Paul Ollendorff, 1887. pp. 121-122.

Bravo, Lohengrin !
Cette anecdote m'en rappelle une autre qui m'est arrivée lors d'un concert "épinette & guitare" ; nous jouions à la Maison de l'Etranger de Marseille dans une petite salle, à quelques mètres du public ; une dame (celle même qui avait organisé le concert), assise au premier rang, se mit à parler pendant un morceau ; mon collègue guitariste s'interrompit alors et lui dit "Madame, ne pourriez-vous pas parler un peu plus fort : je n'arrive pas à saisir tout ce que vous dites...".
(Que l'on veuille bien m'excuser si j'ai déjà raconté cette histoire!).

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"Le doute est le premier pas vers la conviction" (al-Ghazali, mort en 1111).

Il y a beaucoup d'anecdotes sur les castrats, ces grandes stars des 17è et 18è, et notamment sur le célèbre Farinelli ( Carlo Broschi). Son amitié avec Pietro Trapassi dit Metastase, le plus grand librettiste de tous les temps, est connue. Ensemble élèves chez Porpora, ils partent chacun de leur côté faire carrière et ne se reverront plus. Et pourtant ils s'écriront presque chaque jour sous le vocable de " care gemello ", cher jumeau! La correspondance de deux intellectuels très cultivés.
On sait aussi que pendant 10 ans Farinelli chantera chaque soir au roi d'espagne Philippe V, 4 airs, les 4 mêmes airs. Il en ramènera à Bologne dans sa maison de retraite 400 tableaux de maitres de la peinture, fruit de 25 ans passés en Espagne.
Farinelli chantait pour les rois et, très riche, était couvert de cadeaux précieux à chaque occasion. Sauf lorsqu' appelé par Louis XV, et revenant en Italie après sa prestation, un coursier le rejoint et lui apporte le cadeau royal. La voiture repart, Farinelli ouvre le cadeau et trouve une simple boite en or, le cadeau habituel des souverains, rien de digne de lui juge t-il. Il ouvre alors la glace et jette la boite par la portière plein de dédain, racontera son compagnon de voyage.

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.

Anton Bruckner avait une façon fort particulière de séduire des femmes : il faisait cela avec une Bible à la main ! Au lieu de leur faire écouter, en concert, lui-même à la baguette car il savait diriger un orchestre, un mouvement lent de passion inouïe, un amour fou en musique suivi d'un fort bon dîner au feu de cheminée, j'ai personnellement l'impression qu'il leur promettait l'Inquisition !

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"L'Angleterre attend que chaque homme fasse son devoir" (message de l'amiral Nelson à Trafalgar)

Petite anecdote sur Mozart :
En voyage à Rome, Mozart agé de seulement 14 ans entend un opéra lors de répétition qu'il trouve fort joli. Il va donc demander au Pape si il peut acceder à la partitions de cette opéra. Le Pape refuse, Mozart décide donc d'aller écouter cette opéra le soir même, et une fois de retour chez lui il retranscrira tout l'opéra et ceux en l'ayant entendu une seul fois.
Petite démonstration de ce que l'on appel l'oreille absolu que Mozart possèdait.

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Les mots que l'on n'a pas dits sont les fleurs du silence.
Proverbe japonais