Pour avoir le DVD et laisser rarement passer deux mois sans le regarder, je ne trouve pas de qualificatif pour ce film. S'il devait y avoir un héros, ce serait sans doute le piano : j'imagine mal un violon ou autre comme support... Le rapport de l'artiste à son piano, à son désespoir de ne pouvoir en jouer (on le voit dans une scène, un piano est dans une pièce et il laisse courir ses doigts au dessus des touches, il se doit d'être silencieux...). Le moment où il pourrait enfin jouer correspond justement aux fracas extérieurs, à une liberté (réelle?) manifestement oui, à travers les paroles de l'officier allemand. Il existe aussi une scène où l'on peut mesurer l'incroyable décalage, l'horreur qui devient une sorte de fond, de tapisserie : l'important est de gagner un moment. L'épisode de la boite de conserve montre le dérisoire qui devient alors désespoir : j'ai fait le parallèle entre le même problème avec "Trois hommes dans un bâteau". Une boite de conserve, rien pour l'ouvrir ! Là, nulle envie de sourire. Ce film ouvre aussi des portes. On ne peut le regarder, éteindre et voilà. Il incite à creuser ce que fut l'histoire du ghetto de Varsovie (ce qui est vaste), l'arrivée des troupes soviétiques (le mot liberté ne semble plus impacter sur l'acteur). Le support musical est juste ce qu'il faut (trop de Chopin, on aurait été dans la guimauve etc.). Ecouter la BO du film et tout reprend sa place. Si certaines scènes semblent longues, c'est sans doute parce-que la vie, enfin le temps doit prendre une autre dimension à ce moment. On met plus de temps à faire un mouvement lorsque l'on est affamé, malade, ahuri, effaré, effrayé, dans l'incompréhension ; le temps s'arrête... le temps de comprendre... l'incompréhensible et surtout de dégager une idée : survivre. L'officier allemand arrivant plus tôt, ceci aurait fait "Happy end" car bien sûr s'il n'a pas abattu l'artiste, on se doute un peu de ce qui va se passer ensuite. Je suis comme Teckel : j'admire le film de Spielberg, j'acte de la vie de Schindler (quoiqu'un peu magnifiée). L'acteur lui donne de la carrure, Fiennes dans le rôle de l'officier allemand est incroyable, le noir et blanc, un plus mais je n'ai pas cette émotion que rend "Le Pianiste". Les images pour Schindler, nous les connaissons, c'est l'histoire d'un homme qui... et il ne fut pas le seul. Le film est bien réalisé. Kingsley est toujours aussi bon mais la vie de Schindler ne commence pas et ne s'arrête pas à "la liste". J'ai aussi regardé "Joyeux Noël" et pour ce moment, j'ai trouvé ceci parfait. Une profonde réflexion sur les rapports humains à un moment où le papier est déchiré, jeté, où l'on s'extasie devant le dernier truc à la mode : tous les "Noël" n'ont pas été ainsi...
_________________ "... Et si je te semble avoir agi follement, peut-être suis-je accusée de folie par un insensé." (Sophocle)
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