D'après ce que j'en ai lu, il y a bien un double écueil. Il y a peu de matériel, si on trouve beaucoup d'outils de pierre, il y a peu de reste d'autres matériaux. Le matériel que l'on trouve ne peu pas faire l'objet d'interprétation solides en faveur ou en défaveur de la thèse de l’existence de l'art chez les erectus. Les premiers objets qui témoigneraient d'un sens du "beau" remontent à environ - 70 000 ans, de manière sure; malgré quelques témoignages plus anciens. Il y a bien évidement des artefacts plus anciens, mais les spécialistes en sont des fois réduits à essayer d’interpréter quelques traits ou lignes sur des artefacts bien malmenés par l'âge.
Je me permet de citer un ouvrage qui aborde un peu la question: "L'homme, cet étrange animal ..." JF Dortier
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L'outil, première œuvre d'art
Dès l'époque la plus reculée, les hommes semblent prendre goût à la récolte de pierres, de fossiles et de coquillages qui n'ont aucun intérêt, si ce n'est celui d'être beaux. Sur plusieurs sites pu paléolithique inférieur ou moyen, on découvre ainsi la présence de ces curiosa. Le sens esthétique ne suffit pas pour parler de création artistique. Pour trouver un premier témoignage d'un acte créateur, il faut intéresser aux bifaces. Au fur et à mesure que les Homos erectus et ergaster maîtrisaient la technique de taille, ils semblent s'être souciés de plus en plus de donner à leurs outils une forme toujours plus équilibrée, symétrique et laborieuse. Au fil des temps, les bifaces se sont perfectionnés et les formes géométriques simples apparaissent de plus en plus clairement dans leur fabrication. D'où la forme assez pure d'une grosse "amande". Arrivée à ce stade, la finesse de la taille ne correspond plus uniquement à une contrainte technique, mais incontestablement aussi à un souci esthétique.
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La notion d'esthétique fonctionnelle d'A. Leroi-Gourhan est une très belle idée. Cependant, elle pose un problème théorique. s'il y a adéquation forte entre efficacité et beauté, alors il est difficile de déterminer si la beauté apparente de certains bifaces comporte vraiment une dimension artistique (puisqu'elle est indissociable de l'utilitaire). Le mieux serait de trouver des cas où la dimension artistique apparait en propre : qu'il soit en superposition ou en opposition avec l'utilité. Or, cela semble bien être le cas avec certains outils. En Angleterre et en Dordogne, on a retrouvé des bifaces qui ont été taillés sur des blocs où était incrusté un fossile. l'Homo erectus a taillé son silex en prenant soin de placer la marque du coquillage au centre de son outil. On imagine que l'Homo erectus qui possédait un si bel outil ne devait pas être peu fier ! De la Chine au Maroc, on a retrouvé des bifaces qui avaient été taillés dans des matériaux très nobles comme le jaspe, le cristal de roche ou l'obsidienne. cela en faisait de magnifiques objets. Pourtant, la taille est beaucoup plus difficile que sur un matériaux plus ordinaire, et il fallait souvent parcourir des dizaines de kilomètres pour se le procurer. ... Le fait même que la réalisation de certains beaux outils s'avère plus laborieuse et plus longue, ou qu'ils soient plus fragiles, nous indique que les hommes qui les ont utilisés visaient quelque chose de plus que l'utile. Une preuve supplémentaire qui montre combien est réductrice la notion de "culture matérielle", dans laquelle on enferme souvent la période de la pierre taillée.
Pour, illustrer son propos, l'auteur cite 2 découvertes. La première, faite par Gerhard Bosinski qui signale qu'un magnifique racloir en obsidienne a été retrouvé dans la grotte de Kudaro en Géorgie. Il date de 500 000 à 700 000 ans et le site d’extraction du matériau brut se trouve à 100 km. La seconde, à la grotte de la sima de los Huesos sur les monts d'Atapuerca, près de Burgos en Espagne. Ou l'on a retrouvé un biface tellement exceptionnel que les préhistoriens l'ont surnommé "Excalibur". Il est daté par les squelettes présents autour d'il y a 380 000 ans. Il s'agit d'une pièce unique en quartzite aux reflets bleus et orange, dont les matériaux d'origines n'est pas présent à proximité.
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Il a été taillé avec beaucoup de soins, mais ne comporte pas de traces d'usages. Cela suggère qu'il a été façonné uniquement pour accompagner la sépulture. Et si c'est le cas, il s'agirait d'un bouleversement majeur dans les conceptions sur les origines de l'homme et des cultures humaines.
Pourtant, comme l'auteur le rappelle dans les chapitres suivants, il faut attendre -40 000 ans en Europe pour trouver les premières traces de peintures ou de gravures.