Dans la bibliographie de l'ouvrage d'Éric Anceau,
Napoléon III, Texto qui me semble assez complète y compris des ouvrages en langue étrangère, outre effectivement l'ouvrage d'Annie Rey-Goldzeiguer,
Le Royaume arabe. la politique algréienne de napoléon III, (1861-1870) Alger,Soc. nationale d'édition et de diffusion, 1977, on ne trouve que l'ouvrage général de Charles-André Julien,
Histoire de l'Algérie contemopraine, PUF, 1984. Je possède l'ouvrage récent sur l'
Histoire de l'Afrique du Nord, je verrai ce qu'il y est dit...
Je vous mets le texte qu'on trouve dans la Biographie de ANvceau pp. 367-369 (Paragraphe intitulé
L'Algérie, la Méditerranée et le Monde. Je ne mets que ce qui concerne l'Algérie et Napoléon III.
Éric Anceau a écrit :
Napoléon III, l'Algérie, la Méditerranée et le monde
Ce fut aussi en saint-simonien que l’empereur conçut et appliqua une politique active en Algérie, en Méditerranée et dans le monde. Après avoir longtemps considéré les colonies comme des fardeaux, il avait change d’avis, en particulier au sujet de l’Algérie, qui offrait des potentialités immenses, mais qui n’était pas encore totalement conquise et qui, de ce fait, demeurait sous administration militaire.
A la fin de la monarchie de Juillet, Louis-Napoléon avait été frappé par la lecture d’un ouvrage de Prosper Enfantin, intitulé De la colonisation de l’Algérie. Le chef de l’école saint-simonienne y insistait sur quelques idées fortes : le primat des considérations économiques dans l’essor de la colonie, la nécessité d’y organiser sans tarder la propriété, l’intervention souhaitable de l’État, par le biais d'un ministère de l’Algérie et des Colonies, confié à un prince, qui de par sa condition, serait au-dessus des luttes partisanes et qui saurait s'entourer d’une élite d’hommes décidés, dévoués et compétents venus de tous les horizons. Dans son discours de Bordeaux, Louis-Napoléon évoqua l’existence de l’autre côté de la Méditerranée d’«un vaste royaume à assimiler à la France» qu’il envisage, quelques semaines auparavant, d’aller visiter. Encore fallait-il soumettre la Grande Kabylie, qui résistait à la domination française. Le général Randon, nommé gouverneur général au lendemain du coup d’État, y parvint enfin en 1857. Au même moment, 1’affaire Doineau, du nom du chef du bureau arabe de Tlemcen accusé d’avoir assassiné un chef de tribu pour le voler, fit grand bruit ; elle apportait de l’eau au moulin des colons qui ne cessaient de réclamer le passage au régime civil. Sans être encore totalement convaincu de son bien-fondé, car il craignait qu’il ne livrât les terres et les ressources des indigènes à la convoitise des colons. Napoléon III décida d’en tenter l’expérience.
Il songea d’abord à nommer son fils roi d’Alger, mais le projet rappelait trop le roi de Rome. Il envisagea ensuite de faire du prince Napoléon, qui manifestait un grand intérêt pour l’Algérie et qui était très populaire auprès des colons, son lieutenant général sur place. Mais son cousin voulait résider à Paris une grande partie de l'année pour pouvoir lui présenter les affaires importantes, défendre ses projets face aux complots de ses multiples ennemis et négocier avec les corps de l’État les crédits nécessaires à son action. Le souverain se décida donc à le nommer plutôt ministre de l’Algérie et des Colonies, par décret du 24 juin 1858.
Le prince Napoléon mena une politique avancée, consistant à faire entrer progressivement l’Algérie dans le droit commun, avec l’espoir d’assimiler rapidement la population arabe. Cependant, il fut rapidement absorbé par les affaires italiennes et confronté à l’hostilité de ses collègues du gouvernement. Dès décembre 1858, il ne fut plus qu’un ministre par intermittences et finit par donner sa démission, le 5 mars 1859.
Après un intérim de trois semaines exercé par Rouher, Napoléon III lui donna pour successeur le comte de Chasseloup-laubat, qui avait été ministre de la Marine et des Colonies en 1851, qui avait réglé la question de l'indemnisation des colons à la suite l’abolition de l’esclavage et qui était l’ami de nombreux arabes dont Abd el-Kader. Napoléon III l’avait choisi car il le savait aussi sceptique que lui à l’égard de l’assimilation rapide et forcée des Arabes. Avec lui, il entendait mener une politique de «juxtaposition pacifique » des communautés, de recherche de de soutien des chefs locaux et d’exploitation économique par de grandes sociétés privées. La justice musulmane fut réorganisée. Les grands travaux commencés sous Randon et poursuivis sous le prince Napoléon reçurent un élan supplémentaire: encouragement à l'irrigation et au drainage, extension des opérations du Crédit Foncier de France à l’Algérie, modernisation d’Alger, d’Oran, de Bône et de Philippeville, développement du réseau télégraphique intérieur, création d’une compagnie pour construire trois lignes de chemin de fer, vaste programme pour la construction de routes, «premier besoin de la colonisation», de ports et de phares, pour l’assainissement des marais et lagunes et pour la multiplication des forages artésiens.
Cependant, le ministre qui cherchait a pratiquer un «subtil jeu d’équilibre», entre les colons, les militaires et les indigènes satisfaisait ni les uns, ni les autres. Lorsqu'à l'automne 1859, des incidents éclatèrent sur les confins de l’Ouest, Randon, devenu ministre de la Guerre, grossit les faits et et essaya de démontrer à Napoléon III que la politique de Chasseloup-Laubat en était la cause. L'agitation de la Kabylie, quelques mois plus tard, apporta des arguments supplémentaires. L’empereur décida de se rendre sur place pour prendre la mesure de la situation. Son séjour, le premier d’un chef de l’État français depuis la conquête, ne dura que du 17 au 19 septembre 1860, car la mort de la sœur de l'Impératrice obligea le couple impérial à rentrer précipitamment en Europe. Ces trois jours suffirent néanmoins pour confirmer à Napoléon III la mésentente entre les militaires et les fonctionnaires que lui avaient signalées ses conseillers et ses informateurs. Ils renforcèrent aussi ses préventions à l’égard des colons et son estime pour les Arabes, qui lui avaient offert une sublime fantasia de dix mille cavaliers. «Notre premier devoir est de nous occuper du bonheur des trois millions d’Arabes que le sort des armes a fait passer sous notre domination », lança-t-il aux colons aussi médusés qu'irrités. Enfin, ce bref séjour acheva de convaincre le souverain de l'inefficacité d'une administration civile dont les effectifs étaient démesurés par rapport au nombre de colons et dont le coût était supérieur à celui du ministère de l’Intérieur du royaume de Belgique ! Il profita de la réforme libérale et du remaniement gouvernemental qui l'accompagna, le 24 novembre 1860, pour supprimer le ministère. Les colonies firent leur retour au ministère de la marine dont Chasseloup-Laubat prit la direction. Quant a l’Algérie, elle reçut de nouveau un gouverneur général en la personne du maréchal Pélissier. Cependant, si l’expérience du ministère de l'Algérie et des Colonies avait cessé au bout de trente mois seulement, elle n'avait pas été inutile. Un grand essor économique avait été donné à l'Algérie et elle avait achevé de convaincre Napoléon III de l'intérêt du territoire. Il n’en revint pas moins a un strict régime militaire comme en témoignèrent son décret du 10 décembre 1860, qui faisait de Pélissier un véritable ministre résidant et sa décision de nommer sur place, trois mois plus tard, un conseiller spécial, Ismaïl Urbain, saint-simonien converti a l’islam, qui serait ses yeux et ses oreilles, défendrait les Arabes et s’assurerait de l’application de ses décisions. L’Algérie était appelée à devenir la pièce maîtresse de sa grande politique méditerranéenne.
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«Κρέσσον πάντα θαρσέοντα ἥμισυ τῶν δεινῶν πάσκειν μᾶλλον ἢ πᾶν χρῆμα προδειμαίνοντα μηδαμὰ μηδὲν ποιέειν»
Xerxès,
in Hérodote,
L'Empereur n'avait pas à redouter qu'on ignorât qu'il régnait, il tenait plus encore à ce qu'on sût qu'il gouvernait[...].
Émile Ollivier, l'
Empire libéral.