b sonneck a écrit :
Pour qu'une dissuasion agisse, il faut impérativement que la menace sur laquelle elle repose soit crédible. Que les dirigeants français de l'époque aient pu imaginer être dans cette situation en 1939 vis à vis de l'Allemagne est proprement consternant.
J'ai déjà expliqué que nous pouvons porter ce jugement a posteriori parce que nous connaissons la suite des événements. Les contemporains, eux, ne voyaient pas les choses ainsi, et cela ne devrait pas nous "consterner". Il n'était pas évident que les Allemands tenteraient de percer le front à Sedan, et s'ils le tentaient, qu'ils y réussiraient : beaucoup -pour ne pas dire tous- croyaient avec un certain Maréchal que c'était impossible et en tout état de cause voué à l'échec.
Ce que je trouve consternant, c'est qu'il ait fallu qu'un historien allemand (Karl-Heinz Frieser) rétablisse certains faits dans leur vérité et démontre que le succès de l'offensive allemande de mai 1940 n'était pas assuré d'avance, et que "Le mythe de la guerre-éclair" (titre de son livre) doit être mis à plat.
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1- La France n'était pas intervenue en 1936, alors qu'elle en avait largement la capacité, pour s'opposer à la remilitarisation de la rive gauche du Rhin.
Nous, nous le savons mais en mars 1936, personne n'était en mesure de prévoir ce qui allait arriver que 3 ans et demi plus tard. En 1936, l'opinion publique française et les hommes politiques au pouvoir étaient pacifistes. Ils n'inclinaient pas vers la rodomontade de Sarrault ("on ne laissera pas Hitler mettre Strasbourg à portée de ses canons") mais plutôt vers le titre de d'un certain journal : "L'Allemagne occupe l'Allemagne").
Et en plus, l'Angleterre (cosignataire et garante des accords de Locarno) refusait que la France riposte militairement.
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2- Ni la France ni la Grande-Bretagne ne s'étaient opposées en 1938 au démembrement de la Tchécoslovaquie, un allié pourtant nettement plus important que la Pologne.
Il n'en reste pas moins que la France a mobilisé.
Mais la diplomatie a prévalu.
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3- L'armée française, placée en mode défensif derrière la ligne Maginot, bloquée par la neutralité de la Belgique, n'était pas en capacité d'attaquer frontalement l'Allemagne.
Cela reste à prouver.
En nombre et en qualité, la capacité militaire de la France était grande ; mais la doctrine était obsolète.
Le fait est qu'au 3 septembre 1939, l'Allemagne n'avait qu'un rideau de divisions face à la frontière française, et pas un seul char. "L'offensive" de la Sarre aurait pu donner autre chose qu'une mascarade, si on avait eu la volonté politique.
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Dans son ouvrage Une histoire du monde moderne, l'historien britannique Paul Johnson rapporte que, selon les notes prises par un des participants, Hitler aurait déclaré lors d'une réunion du Haut commandement le 22 août 1939 à Obersalzberg que les opérations prévues en Pologne pouvaient suivre leur cours, rien n'étant à craindre de l'Ouest : " Nos adversaires sont des limaces, je les ai vus, à Munich.
C'était le 22 août. Une semaine plus tard, il était abasourdi que l'Angleterre puis la France lui déclarent la guerre.
Ce qui est consternant, c'est que Hitler ait cru qu'il gagnerait toujours à son jeu ("toute ma vie, j'ai joué en risquant tout..." a-t-il dit). A ce jeu, l'Allemagne a tout perdu... le 22 juin 1941. Mais c'est là un autre chapitre.