Vézère a écrit :
Citer :
L'insurrection de 1936 ne peut être isolée des événements qui l'ont précédée : en 1931, les troubles saluant la proclamation de la République
La citation ci-dessus n´est pas de Castillo, mais extraites du Figaro
au moment de la publication de son livre.Quelle est l'ampleur des troubles de 1931 ?
Je regarde ça et là, je vois qu'en 1931 d'après Bartolomé Benassar, plusieurs centaines d'églises avaient été brûlées.
Les troubles de 1931 (plus d`une centaine d´édifices religieux brulés, que ce soit églises, couvents, écoles, monastères...) sont liés effectivement au traitement de la question religieuse dès le gouvernement provisoire nouvellement formé après la chute de la monarchie le 14 avril 1934.
Bien qu´ayant le catholique libéral Niceto Alcalá Zamora et son collègue de la droite libérale républicaine, également catholique, Miguel Maura à leur tète ce gouvernement est également intégré par des menbres des partis républicains et du parti socialiste convaincus que l'un des principes de base du nouveau régime républicain à instaurer doit être la séparation totale de l'Église et de l'État.
Les premières décisions sur la laïcisation de l'État prises par ce gouvernement provisoire furent toutefois très modérées: promulgation de la liberté de culte et approvation de quelques mesures de sécularisation sans importance telles que la dissolution des ordres militaires, l'abolition de l'obligation d'assister à des actes religieux dans les prisons et les casernes, l'interdiction de la participation officielle à des actes religieux...la mesure la plus marquante étant le décret du 6 mai déclarant l'enseignement religieux volontaire et non obligatoire.
Dans le même temps, le Gouvernement provisoire prit contact avec le nonce (le légat du St Siège auprès de l´Eglise espagnole) Federico Tedeschini pour l'assurer que, jusqu'à l'approbation de la nouvelle Constitution, il respecterait le Concordat de 1851 mais qu'en retour l'Église devait montrer qu'elle respectait le nouveau régime espagnol en constitution.
C´est ainsi que, le 24 avril, le nonce adressa à tous les évêques espagnols un télégramme dans lequel il leur transmettait le «voeu du Saint-Siège qu'ils recommandent aux prêtres, aux religieux et aux fidèles de ses diocèses de respecter et obéir aux pouvoirs politiques constitués pour le bien commun et maintien de l´ordre".
Cependant, une grande partie de l'épiscopat était composée d'évêques fondamentalistes (beaucoup d'entre eux nommés pendant la dictature de Primo de Rivera) guère disposés à transiger avec la République et dont le chef de file était le Cardinal Primat et Archevêque de Tolède, Pedro Segura qui le 1er mai rendit publique une pastorale dans laquelle, après avoir abordé la situation espagnole sur un ton catastrophique, fit un éloge de la monarchie et du monarque détrôné Alphonse XIII. La presse républicaine interpréta la pastorale comme une incitation aux fidèles à s'unir pour sauvegarder les droits menacés de l'Église et les partis et organisations de gauche la considéra comme une véritable déclaration de guerre.
Le gouvernement provisoire présenta une note de protestation au nonce Federico Tedeschini pour ce qu'il considérait comme "une intervention dans la politique du cardinal primat, sinon de l'hostilité au régime républicain», et demanda à ce qu´il soit démis de ses fonctions. La presse, de son côté, continua et intensifia les jours suivants sa campagne contre Segura.
C´est dans ce contexte que dix jours plus tard eurent lieu les événements connus sous le nom "d'incendies des couvents" dont le déclencheur fûrent les incidents survenus le dimanche 10 mai, à l'occasion de l'inauguration à Madrid du "Cercle Monarchique Indépendant" (cercle fondé par directeur du journal monarchique ABC destiné à promouvoir une candidature monarchiste aux elections, à venir, des Cortès Constituantes). Au cours de cette célébration les monarchistes provoquaèrent quelque peu les passants sous leurs balcons en jouant la «Marche royale» (l´hymne espagnol monarchiste) sur un gramophone et en lançant des pamphlets au vent dans lesquels ils appelaient à «rendre la vie impossible à cette caricature de République».
Dans la rue, deux nouveaux invités qui venaient d'arriver, eurent apparemment, une discussion politique animée avec le chauffeur de taxi épublicain qui les avait amenés. Plusieurs autres passants se joignirent à cette discussion qui tourna en altercation et où au final trois voitures garées devant le Cercle fûrent brûlées,
Cependant la rumeur se répand vite en ville comme quoi un chauffeur de taxi républicain aurait été assassiné par des royalistes. Une foule se rassembla aussitôt devant le siège du journal monarchique ABC, et la Garde Civile dût finalement intervenir en tirant sur tous ceux qui tentaient d'agresser les occupants du bâtiment et de le brûler, faisant plusieurs blessés et deux morts, dont un enfant.
Le lendemain, lundi 11 mai, alors que le gouvernement provisoire était en session, la nouvelle parvint que la Maison-Résidence des Jésuites à Madrid était en feu. Le ministre de l'Intérieur, Miguel Maura, tenta de faire d´envoyer à nouveau la Garde civile dans les rues pour rétablir l'ordre, mais il se heurta à l'opposition d´une majorité du cabinet et notamment de Manuel Azaña, qui, selon Maura, auraient menacé de démissionner "s'il y avait un seul blessé à Madrid de plus pour cette bêtise». L'inaction du gouvernement permit que brûlassent plus d'une dizaine d'édifices religieux ce jour-là à Madrid.
Dans l'après-midi, enfin, le gouvernement déclara l'état de guerre dans la capitale et alors que les troupes occupaient les rues, les incendies prenaient fin.
Mardi 12 mai, alors que Madrid retrouvait son calme, l'incendie de couvents et autres édifices religieux s'étendait à d'autres villes de l'est et du sud de la péninsule (les événements les plus graves se produisant à Malaga). Plus d´une centaine d'édifices religieux brûlèrent partiellement ou totalement dans toute l'Espagne, et plusieurs dizaines de personnes sont mortes et d'autres blessées au cours de tous ces incidents.